Ré-entreprendre sa vie après 50 ans : les tips de Frédérique Cintrat

Frédérique Cintrat

Après une carrière de directrice commerciale et marketing dans l’assurance, Frédérique Cintrat fonde, à l’aube de son cinquantième anniversaire, Assurancielles – structure de conseil en silver économie. Le succès est au rendez-vous : la cheffe d’entreprise, également coach et formatrice en influence, figure parmi les quarante femmes françaises les plus inspirantes, selon le classement 2020 du magazine Forbes.

Forte de cette reconversion réussie, Frédérique Cintrat publie, neuf ans après “Comment l’ambition vient aux filles ?” (Eyrolles,) un nouveau livre “Ré-entreprendre sa vie après 50 ans “(Dunod) dans lequel elle distille les do’s and don’ts d’un tel changement de cap.

Comment est née l’idée de ce livre ?

Frédérique Cintrat : J’ai constaté un écart entre les représentations admises des personnes âgées de 50 à 60 ans et ce que ces dernières ressentent réellement. Beaucoup véhiculent, notamment sur les réseaux sociaux, ce message phare : « j’ai 50 ans, certes, mais j’ai encore des compétences. »

Mini Guide Reconversion professionnelle

À mon sens, il y a là un vrai décalage entre ce que proposent certaines marques aux quinquagénaires, de l’assurance senior aux contrats obsèques… Une part significative de leur public cible a plutôt l’impression de revivre une adolescence !

En effet, après 50 ans, souvent, les enfants quittent le nid, les enjeux sur les plans personnels et professionnels ne sont plus les mêmes. Les temps de vies sont redéfinis, on a encore envie d’être actif et un bon tiers de carrière devant nous. Le débat actuel sur la réforme des retraites nous le rappelle assez bien.

Mon livre a donc pour but de remettre les choses à leur juste place et de donner des clés aux femmes dans cette tranche d’âge. Beaucoup sont pleines de dynamisme ! J’apporte tout de même ce bémol : attention aux modifications biologiques de la cinquantaine, dont les conséquences peuvent entraîner une baisse d’énergie. Toute la question est de savoir comment gérer ce nouveau paradigme pour pouvoir repartir au mieux.

Avant toute chose, vous appelez à faire attention à sa santé…

Frédérique Cintrat : Oui, inutile de rentrer dans le déni psychologique de la ménopause par exemple qui peut avoir des répercussions sur la production d’œstrogènes, de fermer les yeux sur le cholestérol ou sur les risques de maladies cardiovasculaires. À ce sujet, j’ai donné la parole à la cardiologue Claire Mounier-Véhier qui préconise vivement de se faire dépister vers 50 ans tout en adoptant un comportement permettant de prévenir les risques et de conserver notre énergie : marcher trente minutes par jour, ne plus ajouter de sel, gérer son stress par la cohérence cardiaque… Bref, ce n’est qu’en prenant soin de soi que l’on puisera les ressources nécessaires pour aller de l’avant !

Ce conseil est d’autant plus pertinent que les quinquagénaires sont souvent pris « en sandwich » entre leurs enfants et leurs propres parents. En moyenne, en France, on devient aidant à 53 ans…

Frédérique Cintrat : Arrivée à la cinquantaine, si vous avez la chance d’avoir vos parents, deux solutions se dessinent. Soit ils sont autonomes et la vie continue. Soit ils le sont moins, ce qui vous contraint à prendre soin d’eux plus régulièrement. En parallèle, les enfants deviennent généralement adultes mais ont parfois besoin d’être épaulés. Puis, leur départ du foyer peut avoir des conséquences sur le moral. N’oublions non plus ceux qui s’occupent de leurs petits-enfants !

Face à autant de bouleversements, ré-entreprendre sa vie à 50 ans suppose de reconnaître, encore plus qu’aux autres âges, que le personnel est intrinsèquement lié au professionnel ?

Frédérique Cintrat : Oui car c’est à cette période que se refondent les structures fondamentales de la vie, notamment dans le sillon du départ des enfants. Le couple, se retrouvant seul, peut avoir envie de changement. Parfois, cela est synonyme simplement d’un déménagement mais dans d’autres cas, la volonté de renouveau peut être plus profonde… avec cette idée du « c’est maintenant ou jamais ».

Une fois que l’on a décidé de réentreprendre sa vie, au-delà du sens que l’on donne à son quotidien, se posent les questions de l’environnement dans lequel on souhaite travailler et avec quels types de personnes. Puis, bien sûr, subsiste ce principe de réalité : sur quoi suis-je légitime et comment je vais pouvoir me vendre ? Là, un équilibre est à trouver selon le volume d’économies dont on dispose.

Justement, comment travailler son employabilité à 50 ans ?

Frédérique Cintrat : Le point crucial est de continuer à aiguiser sa curiosité en s’intéressant aux nouvelles technologies, en se rendant à des événements… en clair, sortir ! Il faut constituer son réseau assez tôt et ne pas attendre d’être dans une situation compliquée pour le développer. En somme, la prévention emploi, c’est un peu comme la prévention santé : le mieux est de s’y pencher en amont. Et non quand les premières difficultés commencent à poindre !

Puis, réentreprendre sa vie suppose, à tout âge, d’accepter de sortir de sa zone de confort.

Dans votre livre, vous donnez la parole à des femmes qui se sont lancées dans l’entrepreneuriat après 50 ans et à d’autres qui se réinventent en restant salariées. Cap sur les premières d’abord. Vous en parlez notamment à travers les témoignages de Dominique Guérin, passée de salariée dans l’audiovisuel à cheffe d’entreprise, à la tête de sa société Ping & Pong productions. Ou de la journaliste Sophie Dancourt qui a quitté son emploi pour fonder, il y a trois ans, le média J’ai piscine avec Simone visant à rendre visible les 45 à 65 ans.

Ré-entreprendre sa vie après 50 ans (Ed. Dunod, 2023)

Quel principal enseignement tirez-vous de ces échanges ?

Frédérique Cintrat : Ces entrepreneures ont plusieurs points communs : elles se sont bien entourées, ont été bien conseillées. Et surtout, elles ont analysé s’il y avait un marché solvable, des débouchés. En clair, elles se sont posé des questions de base mais fondamentales : « vais-je avoir des clients » et « suis-je câblée pour ? »… Car on peut aimer faire quelque chose tout en détestant le vendre.

Dans ce dernier cas, mieux vaut rester salariée… Mais n’est-ce pas plus compliqué passé un certain âge ?

Frédérique Cintrat : Cela peut l’être si on veut continuer à être sur une pente ascendante, moins si on est prête à opérer des évolutions transverses. Par contre, il faut avoir cette capacité d’adaptation. C’est bien là que réside toute la difficulté à grimper dans le salariat quand on n’est pas manager. Si l’on est juste experte, dans la data par exemple, on peut être confrontée à la concurrence de jeunes moins chers… À l’inverse, lorsque l’on a dirigé des équipes, les opportunités de progression sont plus nombreuses.

Vous-mêmes avez réentrepris votre vie à 50 ans. Quel a été votre plan d’action ?

Frédérique Cintrat : En réalité, j’ai beaucoup observé, j’ai beaucoup testé ce que d’autres faisaient en me demandant si j’étais capable de faire la même chose. Parfois, on m’a donné des conseils que j’aurais dû écouter : typiquement, ne pas se lancer seule dans l’entrepreneuriat. À l’époque, je n’ai pas voulu obtempérer ou faire de compromis car je sortais du salariat et souhaitais opérer à ma façon. Mais avec le recul, j’ai pu constater à quel point on progresse moins en étant seule. On se retrouve vite à faire de « l’épicerie ».

Une dernière question, celle que vous posez dans votre livre à vos interviewées. Quel conseil donneriez-vous à la jeune fille de 18 ans que vous avez été ?

Frédérique Cintrat : « Trace ta route, fais ce qui te semble bon pour toi et ne t’attarde pas sur ce que l’on attend de toi, les injonctions. »

Claire Bauchart

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