Elles incarnent le frozen yogurt made in France. Mathilde et Constance Lorenzi, parisiennes dans l’âme, sœurs entrepreneures, lancent en 2010 It Mylk, start-up dédiée au yaourt glacé. Depuis, le concept a fait mouche : trois boutiques ont fleuri à Paris, sans compter les points de vente éphémères, au Bon Marché notamment. Rencontre avec deux gourmandes.
« J’avais vraiment envie, au bout de quatre ans, d’arrêter de faire des slides, des powerpoints, de rentrer dans la vie réelle, créer de la valeur ajoutée. » Constance Lorenzi, 34 ans, ne regrette pas les horaires à rallonge des cabinets de conseil en stratégie. « Ce n’est pas moins stressant, ce n’est pas moins de boulot, c’est moins d’argent mais surtout c’est l’accès à la liberté créative» renchérit Mathilde, de deux ans son aînée.
Deux sœurs, une idée
Une seule voix donc pour deux sœurs que l’on pourrait aisément confondre : blondes, joviales, aux CVs de bonnes élèves. Des études de finance pour Constance, une école de commerce suivie de Sciences Po pour Mathilde, passée par le cabinet ministériel de Christine Lagarde. Décidément, rien ne prédestinait ces deux-là à finir dans le yaourt. Et pourtant… « Nous voulions vraiment quitter nos emplois pour pouvoir monter une entreprise, affirme Constance. On a réfléchi à pas mal d’idées. »
Les deux sœurs brainstorment, se demandent dans quelle aventure elles vont bien pouvoir se lancer. La révélation viendra au cours d’un voyage à New York, où les points de vente de frozen yogurt, « FroYo » pour les intimes, sont légion. « Beaucoup d’enseignes implantées dans le monde sont des copier-collers de ce qui se fait aux Etats-Unis, jusque dans le nom, la scénographie des boutiques, raconte Mathilde. Pour It Mylk, nous avons décidé d’aller dans une autre direction: utiliser nos images de petites parisiennes afin de promouvoir un produit français. Nous sommes parties d’une base existante, pour la transformer en un modèle qualitatif nous ressemblant. »
« FroYo » et chic à la française
Une start-up ainsi axée autour du frozen yogurt mais aussi du yaourt artisanal à la française. « On reçoit une livraison tous les matins de la ferme de Viltain située à Jouy-en-Josas, » détaille Mathilde.
It Mylk, un concept prometteur lorsque l’on sait que la France est le deuxième plus gros consommateur européen de yaourts, derrière l’Allemagne. Proposer aux working girls parisiennes un « FroYo » garanti 0% de matière grasse, à agrémenter de fruits frais ou secs, sauces chocolat, caramel ou morceau de gâteaux, c’est donc le credo des sœurs Lorenzi, surfant ouvertement sur la vague du street food chic, comme l’expose Mathilde: « par exemple, pour notre kiosque du XVIème arrondissement, nous avons fait très attention au choix des matériaux, aux tenues des vendeuses. Tout est pensé afin que l’on soit dans une ambiance plutôt « boutique sortant de la rue » que marché. »
Une ambiance familiale
Un business réfléchi par ces deux jeunes femmes qui se veulent complémentaires. « J’ai l’aspect financier, stratégique et Mathilde est plus branchée marketing, communication, indique Constance. Avec un goût commun pour la cuisine ! »
Et travailler entre sœurs, est-ce si facile au quotidien ? « Ca monte vite, il n’y a pas les limites que l’on se mettrait avec un collègue lambda, » concède Constance. « Mais nos parents ne nous laisseraient jamais nous disputer. Ils nous diraient: « vous fermez cette entreprise et vous arrêtez de vous crier dessus, » » s’amuse Mathilde.
Justement, leurs parents, que pensent-ils de cette reconversion inattendue ? « Ils nous ont toujours poussées, ils ne nous ont jamais dit : “tu ne veux pas rester dans le conseil encore cinq ans ?” , affirme Constance. « Heureusement qu’ils sont là pour nous coacher, poursuit Mathilde. La restauration, c’est du 24/24 : gérer des hommes, des machines, des boutiques. Parfois, la fatigue nous rend moins clairvoyantes sur la stratégie et les choses importantes… » « Donc c’est bien de les avoir comme référents : ils connaissent It Mylk, ils prennent de la hauteur car ils n’ont pas les mains dans le cambouis, » complète Constance.
Encouragées par Christine Lagarde
De fait, on ne peut pas reprocher à ces deux acharnées de travail de ne pas mettre la main à la pâte: en 2010, dans leur première boutique à Odéon, elles ont assuré la caisse plus d’une fois ! « Puis, pour communiquer au tout début, comme nous n’avions pas beaucoup de budget, se remémore Mathilde, nous avons mis en scène la création d’It Mylk sur Facebook : la livraison des machines, la création des packagings etc. » « On a ainsi pu viser les gens gratuitement, » rajoute Constance.
Une détermination sans faille doublée, pour l’anecdote, du soutien de l’ancienne patronne de Mathilde : « le jour de l’ouverture, se souvient-elle en souriant, Christine Lagarde a envoyé des motards qui nous ont remis un mot très gentil de sa part. Elle nous souhaitait bon courage ! »
Un message de bon augure car, quatre années plus tard, la marque du FroYo à la française s’est implantée aux Galerie Lafayette, à l’aéroport Charles de Gaulle ou encore, durant l’été, à la Gare de Lyon. « Notre axe de développement depuis un an consiste à vendre en dehors de nos réseaux de distribution, explique Constance. On commence à travailler avec pas mal d’enseignes, ce qui permet de nous développer en dehors de Paris sans avoir de boutiques. Cela va nous permettre d’accélérer et à terme d’être partout en France. » D’It Mylk à It Grows, il n’y a qu’un pas…
Claire Bauchart
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