Stéphanie Pérèle : les dessous d’une saga familiale

Stéphanie Pérèle

Avec son cousin Mathieu Grodner, Stéphanie Pérèle, 35 ans, a repris il y a un an les rênes de l’entreprise familiale fondée il y a plus de 70 ans par sa grand-mère Simone Pérèle. Une histoire de passion et de transmission qu’elle nous raconte avec enthousiasme.

Quel lien entretenez-vous avec l’entreprise familiale depuis votre enfance ?

Stéphanie Pérèle : Simone Pérèle était ma grand-mère. Corsetière de formation, elle a créé son entreprise en 1948 face au succès grandissant de ses créations. Aidée par mon grand-père, elle a monté son premier atelier dans le 9ème à Paris. Mes grands-parents ayant longuement travaillé, ils ont passé le relai à ma mère et à mon oncle dans les années 70. Sous leur impulsion, la société qui n’était qu’une PME française est devenue une PME internationale. Maintenant, presque 75% de notre CA se fait à l’international (85 millions de CA en 2014, 2700 points de vente). J’ai donc toujours baigné dans cet univers, d’autant plus que mon grand-père avait demandé à mon père de rentrer dans la société. Ma mère était directrice de marque et mon père gérait toute la partie industrielle. A la maison, c’était souvent réunion de travail.

Arrivez-vous justement à faire une distinction entre votre vie professionnelle et privée ?

Stéphanie Pérèle : Oui et non. En fait, cela fait tellement partie de mon quotidien que je ne me pose pas la question. J’ai ma vie professionnelle au bureau et personnelle à la maison avec mon mari et mes deux enfants en bas-âge. J’essaie tout de même de préserver ma vie privée pour ne pas exploser. Maintenant, j’y pense tout le temps, et ma mère qui a quitté l’entreprise continue à me téléphoner tous les soirs quand par exemple je suis au salon de la lingerie, pour savoir comment cela s’est passé. J’en discute aussi avec mon mari. Mais ce n’est absolument pas une contrainte. J’essaie également de ne pas enquiquiner mes amies en leur parlant de lingerie, mais en fait elles sont très demandeuses !

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Le goût pour la lingerie était-il partagé par toute la famille ?

Stéphanie Pérèle : Personnellement, le fait de voir mes deux parents évoluer dans ce milieu a créé une vraie attirance, mais ce n’est pas forcément le cas de mes deux autres sœurs qui ont réagi différemment. Personnellement, j’ai envie de travailler dans la société familiale depuis l’âge de 15 ans ! De surcroît, quand on est une femme, la lingerie est un produit encore plus attirant. J’ai toujours été mue par ce désir de perpétuer ce que mes grands-parents avaient eu l’audace de créer à leur époque.

Quel regard portiez-vous sur la marque lorsque vous étiez adolescente ? Et aujourd’hui ?

Stéphanie Pérèle : Lorsque j’étais adolescente, Simone Pérèle incarnait vraiment l’élégance à la française. Aujourd’hui, nous allons parler davantage d’audace créative. Nous avons besoin de moderniser notre image. C’est à cela que nous travaillons avec mon cousin qui est Directeur Général, et moi à la Direction du Pôle Produit. En tant que troisième génération, nous espérons apporter une nouvelle vision.

Avant d’intégrer la société en 2009 quel a été votre parcours universitaire puis professionnel ?

Stéphanie Pérèle : J’ai fait l’IPAG, une école de commerce en 4 ans à Paris. J’ai ensuite suivi une spécialisation à l’Institut Français de la Mode, car je voulais intégrer la société familiale. J’ai ensuite travaillé pendant 4 ans en tant que salariée au pôle Joaillerie de Boucheron, un 1 an au Prêt-à-Porter chez Yves-Saint-Laurent.  C’était important pour moi de faire mes preuves et de regarder ce qu’il se passait ailleurs.

Vous avez succédé à votre mère à la Direction du Pôle Produit. La transition s’est faite facilement ?

Stéphanie Pérèle : Oui. Mon père est parti le premier de la société, avant même que je l’intègre. Ma mère a fait le relai entre 2009 et 2014-2015, jusqu’à ce que je prenne mon poste actuel. Elle a préféré se retirer au fur-et-mesure, et cela m’a permis de bénéficier de son expérience de 30 ans en accéléré. C’est important aussi pour les équipes qui doivent apprendre à travailler avec une nouvelle personne. Nous avons échangé sur des aspects très techniques, fait des essayages, validé des produits…

De son côté, elle était sereine de partir car elle a vu que nous avions le même œil. Aujourd’hui encore je peux la solliciter lorsque j’ai un doute sur la mise au point d’un produit. Et puis, je ne suis pas seule pour décider, nous avons des techniciens purs et durs en interne. De son côté, mon oncle Philippe Grodner, qui assure toujours le poste de PDG, a donné le relai à son fils Mathieu pour tout l’aspect opérationnel. Nous avons tous des rôles bien définis dans la société.

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Quelles sont vos ambitions pour Simone Pérèle ?

Stéphanie Pérèle : Notre objectif, principalement valable sur le territoire français, est de changer l’image un peu vieillote de la marque qui ne correspond pas du tout aux produits proposés. Nous devons modifier notre circuit de distribution pour aller plus directement à la rencontre des consommatrices, via le web ou des points de vente physiques (une première boutique ouvrira dans le Marais en avril, ndlr). A l’international, il existe une vraie reconnaissance du savoir-faire corsetier français. Notre force est de surcroît d’être une marque incarnée puisqu’elle n’est pas une création marketing. Nous avons aussi à nous adapter à des marchés comme l’Asie, très atypique. Les Chinoises par exemple ont une morphologie différente, une teinte de peau particulière, ce qui nécessite la mise au point de collections dédiées.

Le Made in France, est-ce un sujet qui vous souhaitez investir ?

Stéphanie Pérèle : Toute la création de nos produits et le développement pré-industriel se fait en France dans nos bureaux de Clichy. Ensuite nous avons nos propres usines en Tunisie et dans l’Océan Indien qui nous permettent de bien contrôler notre production. La thématique du Made in France n’est pas un sujet sur lequel nous nous sommes positionnés jusqu’à maintenant, avant tout pour des contraintes de coûts et de flexibilité.

Pensez-vous maintenir à l’avenir l’entreprise dans le giron familial ?

Stéphanie Pérèle : C’est notre réelle volonté et une envie partagée par nos actionnaires. Ces derniers ont une vision de la société et des résultats, et nous la portons. Plus les choses se font sereinement, plus les résultats sont qualitatifs. C’est notre crédo !

@Paojdo

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