Sous les Fraises, les fermes urbaines qui rendent nos villes plus vertueuses

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Les superbes jardins sur les toits du BHV et des Galeries Lafayette à Paris : c’est eux ! Laure-Line Jacquier et Yohan Hubert sont les fondateurs de Sous les Fraises, une entreprise qui s’est spécialisée dans la création et l’exploitation de Fermes Urbaines. L’objectif ? Créer des jardins intelligents pour reverdir nos villes et les rendre plus autonomes.

Votre entreprise Sous les Fraises est née en 2014 : pouvez-vous nous raconter la genèse de sa création ?

Laure-Line Jacquier : L’entreprise est née de la rencontre entre deux domaines de compétences. La biologie avec mon associé Yohan Hubert qui travaillait depuis plusieurs années sur les techniques de culture hors sol et la reproduction des milieux vivants, et l’architecture puisqu’il s’agit de ma formation. De mon côté, j’étais très intéressée par les moyens techniques et les acteurs permettant de réinsérer le végétal en milieu urbain. Souvent, celui-ci est le parent pauvre des projets architecturaux, c’est pourquoi je désirais monter en compétences sur ce point. Au final, mon métier est assez original : il ne s’agit ni tout à fait de paysagisme, ni d’agriculture. Sous les Fraises

Aujourd’hui, votre activité consiste à végétaliser les espaces urbains perdus, mais pas que ?

Laure-Line Jacquier : Nous pouvons travailler bien en amont avec nos clients dans les réflexions qu’ils mènent sur leur politique RSE et la façon dont ils vont intégrer la thématique environnementale dans leur projet immobilier. Nous faisons aussi de l’assistance à de la maîtrise d’ouvrage, puis de la conception où nous allons insérer les problématiques de gestion des ressources. Par exemple, nous avons livré notre première installation de biofiltrage des eaux grises (lavabo, douches) pour voir comment les végétaux vont utiliser cette ressource en eau en l’épurant et l’évaporant. Ensuite, nous pouvons entretenir voire exploiter les jardins que nous avons créés. Cela implique aussi une dimension évènementielle pour rendre ces espaces désirables.

Vous avez aussi lancé FarmHouse, une gamme de produits cultivés et transformés à Paris. Envie de répliquer le concept ailleurs ?

Laure-Line Jacquier : Alors oui nous pourrions le faire, mais nous devons d’abord créer les bonnes conditions pour y parvenir car nous devons trouver les professionnels, les circuits de récolte et les distributeurs qui coïncident avec la démarche. A Paris, nous travaillons avec des apiculteurs, distillateurs, cuisiniers… Ce défi n’est pas simple car la problématique du dernier kilomètre demeure identique, même si les trajets sont courts.

Vous avez toujours eu envie d’entreprendre dans un secteur à impact ? Sous les Fraises

Laure-Line Jacquier : Je n’avais pas forcément la fibre entrepreneuriale. Cela a été plutôt une nécessité qui s’est imposée. Je n’ai pas fait d’école de commerce mais d’architecture qui demeure un bel apprentissage de la gestion de projet de A à Z. J’apprends mon métier chaque jour car au contact d’une multitude d’acteurs différents : des géants comme Auchan ou Unibail, des promoteurs, des agriculteurs, des architectes… Mais je pense qu’aucun entrepreneur n’est jamais vraiment préparé à ce qui l’attend !

Comment avez-vous assuré votre financement, êtes-vous allés voir des fonds à impact ? Sous les Fraises

Laure-Line Jacquier : Et bien non, nous avons réussi à financer seuls notre développement, passant de 2 à 16 salariés. Cela correspondait aussi à notre volonté de nous stabiliser et d’avancer pas à pas dans un métier qui n’existait pas encore. Et finalement, nous nous sommes développés plutôt rapidement.

Quel est votre business Model ?

Laure-Line Jacquier : Il est assez complexe ! Nous faisons en sorte que les activités qui ne sont pas encore rentables soient soutenues par celles qui le sont déjà. Par exemple, l’épicerie demande de créer un réseau de distributeurs et de partenaires, ce qui peut prendre du temps. De manière générale, l’économie de Sous les fraises gravite autour de cette question : quelles sont les externalités à prendre en compte pour que cette nature en ville puisse exister et être désirable par tous ?

Aujourd’hui, vous avez donc passé le cap des 5 ans ?

Laure-Line Jacquier : Oui, nous ne sommes plus vraiment en mode start-up et avons dépassé le stade de la preuve du concept. Malgré tout, il va encore falloir attendre un peu avant que le sujet de la végétalisation en ville devienne la règle. Mais je ne me fais pas de soucis pour notre domaine d’activité. Peu à peu, à travers des expérimentations, nous trouvons le bon équilibre dans la manière dont nous nous insérons dans les projets.

Aujourd’hui, une vague de nouveaux agriculteurs est en train de naître. Comment vous positionnez-vous par rapport à cet univers ?

Laure-Line Jacquier : Clairement, nous ne pouvons pas faire de parallèle entre l’agriculture urbaine et les problématiques en milieu rural. Ce serait maladroit. Nous sommes moins dans un objectif de productivité que de réhabilitation de la nature dans les villes. Par contre, cela implique dans les deux cas de veiller aux équilibres des écosystèmes. On parle alors de bien commun, à la campagne comme à la ville, afin de retrouver une échelle plus humaine et une logique locale.

Quels sont vos prochains grands projets ?

Laure-Line Jacquier : Nous allons inaugurer de nouveaux jardins urbains à Bordeaux, Marseille ou encore Lille. Un autre grand projet sera livré en hiver prochain à Paris : le réaménagement de l’immeuble Mornand. Les défis pour Sous les fraises sont encore nombreux mais le plus important demeure que les espaces conçus puissent être stables et autonomes. Il est essentiel de trouver des synergies positives entre les ressources disponibles et ce dont les villes ont besoin. Nous devons rendre notre environnement et nos bâtiments urbains plus intelligents. Rien ne doit être gâché, tout se renouvelle et l’objectif est de sortir d’un modèle de consommation de ressources que l’on n’est pas capable de produire.

Paulina Jonquères d’Oriola

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