Maëlle Gavet, la Française qui a séduit la Russie

Maëlle Gavet, la Française qui a séduit la Russie
En 4 ans, elle a su conquérir le marché du e-commerce en Russie grâce à Ozon

CEO de la holding Ozon, l’équivalent d’Amazon en Russie, à 35 ans cette Française est une des femmes d’affaires qui comptent en Russie. Elle vient d’ailleurs d’être élue Rising Talents 2013, lors du dernier Women’s Forum qui se tenait la semaine dernière à Deauville. Elle fait donc partie de ces femmes, de moins de 40 ans, dont le potentiel est reconnu et qui seront, certainement, les figures influentes de l’économie mondiale de demain. Maëlle Gavet a déjà bien tracé son sillon slave. Rencontre avec une business woman qui n’a pas peur des challenges.

J’ai finalement dû beaucoup sécher les cours en réalité ! L’ancien directeur de SciencesPo, Richard Descoings, m’a permis d’aménager mon emploi du temps pour me permettre de me rendre fréquemment en Russie. J’ai suivi de loin mes études à l’ENS et SciencesPo. Je passais beaucoup plus de temps à développer l’entreprise d’événementiel que j’ai montée avec un partenaire russe, qui a financé le projet.

Être une femme chef entreprise, en Russie, est-ce plus facile qu’en France ?

N’ayant quasiment jamais travaillé en France, je ne peux me fier qu’aux dires de mes amis français. Mon ressenti est que le plafond de verre n’existe pas en Russie, et ce en raison de tout le passé communiste du pays. Mais j’ai constaté que les statistiques actuelles infirmaient mon propos car peu de femmes sont à la tête de grandes entreprises ou dans les comités exécutifs. Je n’ai jamais été confrontée au sexisme en Russie, mais les choses sont différentes quand on travaille dans le e-commerce, si on compare avec les entreprises étatiques. Les Russes ont des valeurs traditionnelles tout étant égalitaires.

Comment êtes-vous arrivée à la tête de Ozon, un géant du e-commerce en Russie ? 

Je travaillais en Russie pour BCG (Boston Consulting Group) et j’ai été débauchée par Ozon. Ils m’ont fait une proposition que je ne pouvais pas refuser. Et je parle russe, une grande aide pour être facilement intégrée dans le business. J’ai d’abord été nommée à la tête du département marketing et relation client, que nous avons entièrement restructuré et optimisé, avec mon équipe. Après une année, on m’a proposé de remplacer le PDG dont le contrat arrivait à échéance. J’aime les challenges, je n’ai donc pas pu refuser. A mon arrivée, nous faisions moins de 100 millions de dollars de chiffre d’affaires, aujourd’hui, après une levée de fonds de 100 millions, nous engrangeons 1/2 milliard de dollars de CA. Et ce n’est qu’un début, le potentiel de développement du e-commerce en Russie est encore très important.

Avez-vous appliqué les même méthodes que lors de votre arrivée au département marketing, pour faire de Ozon un leader sur son marché ?

J’ai capitalisé sur les forces de l’entreprise, en restructurant la partie courrier et livraison sous l’entité O-Courrier, qui gère la quasi totalité des commandes effectuées sur le site. Notre force réside dans notre rapidité de livraison, sur un vaste territoire comme la Russie, c’est primordial. J’ai également mis l’accent sur l’accessibilité à notre service client, qui est ouvert 7 jours sur 7, 24h sur 24h. Nous avons aussi ouvert, il y a 4 ans, O-Travel qui propose du booking de billets de train, d’avions, d’hôtels. Notre objectif est d’offrir une large palette de services online en Russie et dans le monde slave.

Justement, quelle est l’offre d’Ozon ? 

L’entreprise est née en 1998 et notre marché historique est la vente de livres qui représente toujours 30% de notre business aujourd’hui. Depuis nous nous sommes diversifiés et nous vendons de l’électronique (téléphones, tablettes, télévisions…) et des produits de consommation courante pour la maison, les enfants, le bien-être, le sport… Ce dernier segment du marché est celui qui croît le plus aujourd’hui.

Comment voyez-vous le développement de cette holding qui comprend 5 entités aujourd’hui ? 

Le marché russe a un potentiel énorme. On compte, aujourd’hui, 60 millions d’internautes sur une population d’un plus de 142 millions d’habitants. Et seuls 20% environ achètent en ligne. Mon objectif est donc d’asseoir notre place sur le marché russe, tout en continuant notre développement dans tous les ex-pays satellites de l’URSS. Ozon est déjà présent au Kazakhstan, en Biélorussie et en Lituanie.

Une spécificité du marché russe est le paiement à la livraison ? 

Les russes ont, en effet, l’habitude de payer en cash. Et vous savez, le paiement en ligne vient à peine de faire son entrée en Russie, depuis un mois seulement ! Je pense que le paiement à la livraison est tellement ancré dans les mœurs, que la transition sera longue et lente. Il représente aujourd’hui 78% des transactions et tout fonctionne très bien. Notre filiale O-Courrier, qui réalise 90% de nos livraisons, est un maillon indispensable de notre chaîne logistique.

Être élue ‘Rising Talent 2013’ est un aboutissement pour vous ? 

Je suis trop jeune pour penser ainsi ! Et j’avoue qu’avant d’être contactée pour recevoir cette distinction, j’ignorais qu’elle existait. C’est finalement en étant présente sur le Women’s Forum que je me suis rendue compte de son impact. J’ai ainsi pu rencontrer des femmes, et des hommes, car il y en a aussi, du monde entier. J’aime travailler, me dépasser et je ne réalise finalement que maintenant le chemin parcouru. Il reste encore beaucoup de travail chez Ozon et plus tard ailleurs ! En France ou dans un pays anglophone. Je suis toujours en quête de nouveaux challenges et Ozon en est un grand, aussi vaste que le monde slave !

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