Estelle Brachlianoff, la “power woman” de Veolia

Estelle Brachlianoff, la "power woman" de Veolia

 

A 44 ans, Estelle Brachlianoff est à la tête d’une des plus grosses filiales de Veolia en Grande-Bretagne et en Irlande. En trois ans, elle a réussi à totalement transformer le business model de l’entreprise, autrefois fondé sur le triptyque : Eau, Energie, Déchets pour aller vers l’économie circulaire. Portrait d’une leader éclairée qui va vite !

Un parcours tout tracé ? 

A l’entendre, tout s’est passé le plus simplement du monde, bonne élève, Estelle Brachlianoff intègre naturellement Polytechnique encouragée par une mère ingénieure elle-même, qui ne cessait de lui parler d’Anne Chopinet, la première femme qui intégra l’X : “cela faisait partie des mythes familiaux” note t-elle.

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Pourtant, en dépit d’un parcours de première de la classe, loin d’elle les plans de carrières: Mon ambition s’il y en avait une c’était de m’amuser dans ce que je faisais et d’avoir l’impression que cela ait du sens.” Du sens, voici un terme qui revient souvent dans son discours et qui marque ses premières années dans la fonction publique où elle participe à de nombreux projets d’infrastructures comme la construction de tramways, d’autoroutes ou encore d’urbanisation de la ville avec pour objectif de construire “une ville meilleure, plus vivable et plus citoyenne.” Pourtant après 10 ans passés dans l’administration, elle aspire à de nouveaux challenges : “Ce côté parcours tout tracé qui passe par des étapes forcément obligatoires dont quelques-unes un peu grisâtres cela m’a fait fuir.” Car elle n’aime rien tant que de se mettre en danger et refuser les certitudes.

“Think out of the box” ou l’art d’innover 

Estelle Brachlianoff intègre ainsi Veolia, un groupe industriel qui la séduit : “j’avais besoin qu’il y ait des gens, des usines, qu’on fabrique des choses et Veolia est une boîte industrielle qui touche au quotidien, c’est un métier absolument formidable !”

A la tête de Veolia UK & Ireland depuis plus de deux ans, elle a su faire évoluer une entreprise traditionnelle fondée sur trois pilliers : Eau, Energie, Déchets en un champion de l’économie circulaire. Qu’est-ce que c’est ? “Nous aidons nos clients que cela soit des collectivités locales ou des groupes industriels à produire le même résultat en utilisant moins de ressources, moins d’eau, moins de matières premières et moins d’énergie.”

L’autre aspect tout aussi intéressant est de trouver dans les déchets, des éléments qui peuvent être sources de valeur : “Les balayures de voiries qui ressemblent à de la poussière, c’est quelque chose qui typiquement va en décharge. Sauf qu’en y regardant de plus près, on a trouvé du palladium et du platine, deux métaux précieux, très chers, utilisés dans la bijouterie mais aussi dans la micro-électronique. Nous extrayons désormais ces deux métaux et faisons au sens littéral du terme, de ” l’urban mining”, ce qui est une révolution”.

Son secret pour encourager l’innovation dans une entreprise qui compte plus de 14 000 salariés, Estelle Brachlianoff nous le livre : “questionner les évidences” et “remettre à chaque fois, les initiatives, le quotidien de l’entreprise dans une vision plus stratégique et passer du temps à la partager, à embarquer les managers et pas que le Top 10 ! “.

Un management plus horizontal et inclusif qui l’a amenée à lancer un concours à la “Dragon Dens”* pour trouver de nouveaux business models avec des salariés qui viennent pitcher leurs idées de business auprès d’un jury composé de salariés en interne mais aussi de clients. A la clé pour les gagnants : du temps, de l’argent ou les deux pour développer leur projet. A ce jour, plus d’une dizaine d’idées ont été présentées dont la moitié retenue : “certaines sont à un stade d’incubation, d’autres sont devenues du business courant”. Elle a d’ailleurs fait des émules puisque d’autres entités du groupe ont adopté cette forme d’intraprenariat.

La diversité : clé de voute du succès 

La clé du succès pour une entreprise plus innovante réside aussi dans une plus grande diversité au sein des instances dirigeantes. A son arrivée, le comité exécutif était composé en majorité d’hommes de plus de 50 ans avec 30 ans d’expérience dans les déchets : “J’ai renouvelé mon équipe car si vous n’avez pas une équipe diverse, vous ne serez pas innovants.” Aujourd’hui, le Comex compte ainsi trois femmes : une américaine, une irlandaise et une française avec des profils variés : “J’ai autour de la table des faiseurs de court terme, d’autres qui sont des penseurs de moyen-long terme, des gens plus créatifs d’autres plus carrés et je pense que c’est cette « sauce là » qui fait le succès “.

Seule femme au comité exécutif du groupe Veolia, elle a su s’imposer même si tout ne vient pas de soi : “On arrive à faire passer des idées mais la première étape est difficile, l’étape d’avoir l’impression d’être totalement transparente est un moment où on se sent assez seul.” Elle l’avoue pourtant, elle n’imaginait pas que ces questions de genre pouvaient jouer : “Pendant 10 ans pour moi la question était évidemment non. Tout cela est basé sur le mérite. Après, on vit des expériences et c’est là qu’on se rend compte qu’il y a des biais, un plafond de verre, un sujet homme/ femme mais cela a mis un certain temps chez moi.”

Les recettes d’une femme dans un monde d’hommes 

Aujourd’hui engagée sur ces questions à travers notamment un club de femmes CEO de la chambre de commerce franco-britannique, Estelle Brachlianoff livre ses recettes pour mener une vie épanouie tant professionnellement que personnellement : “choisir le bon partenaire et que cela soit un choix des deux avec une balance : un moment dans une vie professionnelle cela peut être vous qui aurez plus de tâches à la maison et en l’occurrence en ce moment, c’est plutôt mon mari. Peut-être que dans quelques années cela sera différent”.

Avant de nous quitter et face à cette “Power Woman “, difficile de ne pas lui demander son conseil pour les femmes : “Croyez-en vous et en vos intuitions. Par contre, ne croyez pas en ce que l’on attend de vous. Si vous avez envie de devenir patronne d’une boîte vous le pourrez, ne vous laissez pas dicter vos choix par la société ou par votre entourage proche” car pour elle “When there’s a will, there’s a way” !

Véronique Forge

Estelle Brachlianoff est Présidente de la Chambre de Commerce Franco-britannique depuis juin 2015 et au conseil d’administration de Zodiac Aerospace depuis janvier 2016.

*Dragon dens est une émission de télé-réalité qui fait concourir des start-ups et des entrepreneurs face à un jury d’experts.

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