Ancien secouriste en haute montagne, Pascal Sancho a passé sa vie à évoluer dans des environnements extrêmes où l’engagement, la solidarité et la lucidité sont des conditions de survie. Dans son livre S’élever ensemble aux éditions Mareuil, l’auteur partage une vision du collectif façonnée par l’« esprit de cordée », cette alchimie unique née de l’interdépendance entre les membres d’une équipe face à l’adversité. À contre-courant d’un management fondé sur la compétition et la performance individuelle, il plaide pour un leadership d’humilité, de sens et de responsabilité partagée. Une philosophie inspirante pour repenser les dynamiques professionnelles et remettre l’humain au cœur des organisations.
Votre parcours de secouriste en haute montagne est profondément lié à ce livre. En quoi la montagne vous a-t-elle permis de mieux comprendre les dynamiques humaines et collectives ?
Pascal Sancho : La haute montagne est un milieu exigeant où l’on risque sa vie. La relation à l’autre y est permanente et se doit d’être authentique, sincère, loyale et humble. Car c’est avant tout une question de survie. Cette éducation singulière se traduit dans un esprit atypique appelé « esprit de cordée » et un leadership d’objectif et de momentum.
Vous comparez la cordée en montagne à la dynamique d’équipe en entreprise. Quelles sont, selon vous, les clés pour créer une « cordée » efficace au sein d’un collectif professionnel ?
Comment un.e manager peut conjuguer exigence de résultats et bien-être collectif ?
Pascal Sancho : Vaste sujet ! Beaucoup n’ont rien à faire dans le management qui nécessaire de réelle qualité humaine et professionnelle. Avant d’ambitionner de manager les autres, il est important de se manager soi-même. Humilité, engagement, exemplarité sont des vertus contagieuses … Encore faut il les posséder.
Le monde de l’entreprise est parfois perçu comme un espace de compétition. Comment faire émerger davantage de coopération ?
Pascal Sancho : Grâce à l’objectif commun, qui met en valeur toutes les composantes qui contribuent à l’atteindre ! L’aventure professionnelle doit devenir une aventure humaine et celle-ci ne peut être que collective. On ne réussit pas sans les autres. C’est une question d’état d’esprit !
Trop de personnes pensent qu’en s’insérant dans un collectif, ils vont s’y noyer. Qu’ils ne seront pas identifié pour progresser dans la pyramide, et c’est une erreur. Le collectif est un révélateur pour soi-même, mais aussi pour les autres. Les bons resteront bons et les excellents le seront que par ce qu’ils se révèlent grâce à l’autre.
Tout cela doit être évalué et permettre à chacun de progresser honnêtement en fonction de sa réelle valeur. L’encadrement a un rôle majeur d’objectivité pour éviter toute notion d’injustice comme le favoritisme par exemple… On privilégie donc l’émulation qui respecte l’autre et conduit à la collaboration, plutôt que le rapport de force qu’engendre la compétition.
Vous insistez sur l’importance de l’échec dans la progression. Comment aider les équipes à l’accueillir positivement ?
Pascal Sancho : Une fois encore l’état d’esprit et l’intelligence émotionnelle de l’encadrement. Une réussite sans échec n’existe tout simplement pas ! Une difficulté, un contretemps, un revers ne sont pas des échecs qui revêtissent une notion définitive. Et même dans ce cas, il est toujours possible de construire. Simone Veil disait que dans chaque larme subsiste un espoir. Don acte !
Quels sont vos conseils pour mieux gérer ses échecs et ses réussites ?
Pascal Sancho : Les voir comme une étape vers la réussite du lendemain, et surtout les analyser objectivement pour en tirer la substance et progresser. Une erreur fait partie de la dynamique de construction, la répéter est une faute ! Cultiver la pensée positive est alors très important.
Qu’est ce qu’un bon leader selon vous ?
Pascal Sancho : Le leadership selon moi ne s’apprend pas, à contrario du management. C’est une force intérieure que l’on possède sans même le savoir parfois, et qui se révèle selon les circonstances. Dans tous les cas, un leader a une vision plus tôt que les autres. Son comportement et sa personnalité font qu’ils entraînent naturellement les autres qui lui accorde cette force. Le leadership ne se conquiert pas il est toujours accordé par le groupe au final.
Dans votre livre, vous évoquez des figures comme Reinhold Messner, Simone Veil ou Steve Jobs. Qu’ont-ils en commun selon vous ?

Pascal Sancho : La vision, l’abnégation, la détermination, l’audace qui est la forme intelligente du courage et qui fait que, même dans les pires conditions, on trouve le bon chemin. Si ce n’est le moins mauvais !
Vous avez été confronté à des situations de vie ou de mort. Quelle place la vulnérabilité peut-elle avoir dans un monde souvent obsédé par la performance ?
Pascal Sancho : La vulnérabilité fait parti de chacun d’entre nous ! La nier est une illusion qui conduit à la faiblesse. La reconnaître est une force qui permet de connaître ses limites, ses faiblesses, et de les surmonter ! La haute performance impose de connaître ses points de vulnérabilité, sans quoi il n’est pas possible de briser son propre plafond de verre pour se surpasser.