Envie d’évasion ? Cultivez votre “intelligence nomade”

Envie d'évasion ? Cultivez votre "intelligence nomade"

Hong Kong, Singapour, San Francisco, Sidney… des métropoles qui taquinent l’imaginaire de jeunes cadres ou entrepreneurs en quête d’aventure. Partir s’installer à l’étranger serait presque devenu un passage obligé dans la construction d’une carrière.

Peut-être vous est-il arrivé d’évoquer le projet avec des amis ? Vous avez certainement reçu une flopée d’encouragements, et êtes reparti avec la certitude que ce projet ne vous apporterait que du bon. Mais l’expatriation (au sens large du terme), est-elle vraiment faite pour tout le monde ?

La question mérite d’être posée, car en fait, on ne se la pose plus. Magdalena Zilveti Chaland, psychologue et coach de vie, experte dans l’accompagnement des francophones durant leur transition de vie à l’étranger, estime qu’une expatriation « peut s’avérer coûteuse pour certains en termes d’énergie », notamment en fonction des caractères de chacun.

Les personnalités les plus introverties devront faire davantage d’efforts pour s’adapter à cette nouvelle situation. Difficultés d’intégration de la famille, échec du couple, projet qui tombe à l’eau… le tableau n’est pas toujours parfait. « Les expatriés se mettent une pression énorme et se disent qu’ils n’ont pas le droit d’échouer. Mais il faut aussi relativiser la notion de succès. Tout échec apporte forcément quelque chose », estime la coach, auteure de l’ouvrage « Réussir sa vie d’expat’ », aux éditions Eyrolles.

Partir avec un objectif

La clef d’une expatriation réussie réside avant tout dans la bonne préparation de cette mobilité. « Même si vous ne partez que pour une durée déterminée, et que vous suivez par exemple votre conjoint, demandez-vous ce que vous souhaitez réellement retirer de ces deux années à venir.

Les objectifs peuvent être très variés. Mon conseil est vraiment d’anticiper au maximum », raconte-t-elle. Magdalena nous explique qu’une période de flou suit généralement l’excitation du départ et l’aspect logistique de l’expatriation, surtout lorsque l’on est celui qui reste à la maison. L’exemple typique est la jeune maman qui travaillait jusque lors, et se retrouve seule face à elle-même, sans repères dans un nouveau pays, ou même simplement une nouvelle région.

La coach de vie met ici en avant l’avantage des carrières « portables » (métiers qui peuvent se pratiquer à distance) dans ce cadre de vie. Une expatriation peut aussi mener à réfléchir à une reconversion, en raison d’une non reconnaissance des diplômes.

Trouver un chez soi intérieur

L’être humain est toujours mieux dans sa zone de confort, « c’est pour cela que certains continuent à vivre dans un quotidien qui ne les épanouit pas, mais les rassure », affirme Magdalena Zilveti Chaland. Pour s’épanouir à l’étranger, il est important de « savoir qui l’on est », martèle la coach, « d’évaluer les valeurs qui font partie du négociable et du non négociable ». Lorsque l’on s’installe à l’étranger, le choc culturel est inévitable, et s’avère parfois plus fort dans des pays que l’on pensait semblables à notre patrie d’origine. Pour notre spécialiste qui réside en Californie, c’est par exemple le cas des Etats-Unis. « En vacances, on a l’impression que le pays est très similaire, mais lorsque l’on rentre vraiment en contact avec les gens, on se rend compte qu’il est par exemple difficile de nouer des relations d’amitié véritables »,

expose-t-elle. Face à ce choc culturel, l’idéal est de parvenir à trouver un certain équilibre : ne pas rejeter en bloc le nouveau pays, mais ne pas non plus tomber dans la « suradaptation ». Le bilan personnel est donc fortement recommandé afin de préparer au mieux cette expatriation. Etre bien avec soi-même, trouver les ressources personnelles qui nous apaisent, permet de se sentir bien partout. Paradoxalement, lorsque l’on connaît ses racines, qu’on les chérit, on est justement encore plus armé pour faire face à des désillusions car les échecs ne remettent pas en cause la personne que l’on est fondamentalement. Les choses sont finalement plus délicates quand on part à l’étranger pour trouver des réponses sur soi. Même si, fort heureusement, certains arrivent les trouver lors de ces expériences !

Réussir sa vie d'expatDevenir citoyen du monde

On l’a dit, certaines personnalités seront un peu moins à l’aise durant cette phase d’adaptation. Pour autant, l’intelligence nomade, ça se développe ! « L’intelligence nomade est la capacité à s’ajuster à une situation nouvelle et différente », affirme Magdalena Zilveti Chaland. Il ne s’agit donc pas seulement de mobilité géographique. Curiosité, esprit d’ouverture, tolérance, empathie et résilience sont les qualités les plus utiles à l’expatrié. L’intelligence nomade a pour corollaire l’intelligence émotionnelle et relationnelle.

Pour les plus timides, mais aussi pour les autres, Internet constitue un formidable vecteur de rencontres quand on arrive dans un pays étranger. Les groupes d’entraide permettent d’échanger des bons plans mais aussi de rencontrer des amis potentiels. Le sport, les associations, voire la religion, sont autant de vecteurs qui facilitent cette mise en relation.

Le nomade doit donc être pro-actif et ne pas attendre que les gens viennent à lui. « Il faut réseauter au maximum », renchérit la coach. L’intelligence nomade, c’est surtout la capacité à rebondir, à s’adapter à l’environnement, à tirer le meilleur de la culture du pays. « Il n’est d’ailleurs pas rare que de nombreuses femmes se découvrent entrepreneures en arrivant dans des régions comme la Californie qui sont très stimulantes », note Magdalena Zilveti Chaland. Au final, et c’est surtout le cas des enfants nés à l’étranger, il est tout à fait possible de devenir un « citoyen du monde ».

Née de parents chiliens exilés politiques, Magdalena a vécu en France, avant de s’installer il y a douze ans aux USA. Ses racines, elle les trouve dans ces multiples expériences. Il lui suffit d’un goût, d’une odeur, pour retrouver ses sensations d’enfance et sentir son « home ». D’autres transportent leurs objets fétiches pour reconstituer leur petit cocon aux quatre coins du monde.

Les difficultés de l’impatriation

Puisque nous avons parlé d’expatriation, nous ne pouvons pas éluder la question du retour au pays. Lorsque l’on part à l’étranger, aux alentours de 30 à 40 ans, certains choix difficiles vont devoir être faits. Ils appartiennent à chacun. Annonce d’une maladie, décès, parents vieillissants…

L’expatrié devra souvent vivre avec une forme de culpabilité de se trouver si loin de sa famille. « Il faudra mettre en place des stratégies pour s’organiser, pour permettre aux grands-parents de voir leurs petits-enfants etc », note Magdalena. Avec la distance, une forme de nostalgie du pays peut survenir.

S’il n’est pas forcément mauvais de cultiver ces madeleines de Proust dans son quotidien d’expatrié, attention aux désillusions quand l’on choisit de rentrer. « Certains expatriés ne sont pas conscients qu’ils ont changé, que les autres ont changé, que leur regard sur le monde a changé », ajoute la coach. Tout comme l’expatriation, l’impatriation doit se réfléchir. Il ne s’agit pas simplement de retrouver sa vie d’avant, car le monde évolue sans cesse, mais de créer un nouveau projet de vie. Bref, faire preuve une fois encore d’intelligence nomade !

@Paojdo

Crédit Photo : Kappuru / Life of Pix

 

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