Etre une femme dans la Chine d’aujourd’hui

Femmes et hommes de pouvoir - Convaincre - Le vêtement: outil de persuasion ou de séduction?
De retour de Chine, Muriel de Saint Sauveur, nous livre ses reflexions sur la situation des femmes dans la Chine moderne. Entre tradition et modernité, les chinoises tentent de trouver leur place.

Après le coup médiatique organisé par le Chinese Business Club invitant à Paris Sophie Marceau comme « Guest star » de la journée de la femme le 8 Mars 2016, on pourrait croire que notre actrice serait la vedette française de la Chine. Des hommes chinois peut-être, mais pour les femmes je pencherais plutôt pour la styliste Stella Mc Cartney dont les chaussures à plateforme font fureur dans les grandes villes. femme dans la Chine

Qu’elles soient à 100 euros ou à 650, vraies ou fausses, elles se retrouvent aux pieds d’un bon nombre de femmes chinoises rêvant de ressembler à nos icones de mode. A l’instar du communisme russe, le communisme chinois a donné des droits aux femmes identiques à ceux des hommes. femme dans la Chine

Celui de travailler, de divorcer, d’être indépendante mais certainement pas celui d’être féminine et d‘oser le montrer. On retrouve dans ces deux pays la joie de se vêtir comme un mannequin, d ‘apprécier sa féminité mais aussi les deux rêves communs et antinomiques, celui d’épouser un homme riche ou d’être une femme libre et indépendante. Mon dernier voyage dans ce pays organisé pour la journée de la Femme a confirmé encore une fois combien il est difficile de parler des femmes tant sont nombreuses les facettes et les styles des femmes chinoises.

Comme le décrivent Tania Angeloff et Marylène Liebern dans «Chinoises au XXIème siècle »*, quoi de commun entre la paysanne restée à la terre et qui est dépendante de l’économie familiale, la jeune rurale qui en devenant ouvrière dans une usine gagne un peu d’indépendance financière, mais un peu moins que celle qui devient domestique dans une ville, et la jeune urbaine qui entre à l’université ou la citadine diplômée soutenue par sa famille.

Et que dire de la femme chinoise dirigeant un club d’affaires de renom m’avouant sa difficulté à être une bonne mère ! Outre les différences sociales, il y aussi les différences géographiques à l’inverse de notre culture européenne : le Sud y est plus égalitaire alors que le Nord traditionnel empêchera toujours un homme de faire la cuisine. Pour le moment en tous les cas.

Une pression sociale très forte, des traditions ancrées dans la société contemporaine femme dans la Chine

Il y a de multiples façons d’être une femme en Chine et l’on voit dans ces différences les contradictions de ce pays. La campagne où la femme travaille autant que l’homme peut envoyer une gamine se marier pour de l’argent lorsque la pauvreté atteint un stade insupportable. Celles qui s’en sortent seront heureuses de devenir la « Ayi » (femme de ménage) d’une famille. La jeune étudiante de Chengdu, la capitale du Sichuan, 9 millions d’habitants, magasins ouverts jusqu’à 22 heures le soir, rêve de liberté.

Celle que ses parents poussent à être la première de l’Université de Shanghai sait qu’elle devra avant 30 ans, trouver un job et un bon mari, puis faire un enfant, puis s’occuper de ses parents et beaux-parents. Alors faire un deuxième enfant comme le gouvernement le permet maintenant, n’est franchement pas à l’ordre du jour des jeunes couples qui ne voient déjà pas comment acquérir tous les objets dont ils rêvent avec un enfant ;

Alors avec deux ! Et puis à l’extrême bout de l’échelle, il y a Zhang Xin, la présidente de Soho, groupe immobilier de Shanghai, que l’on retrouve dans les « Women’s Forums » et qui est le rôle modèle qui permet à certains de dire que l’égalité entre les femmes et les hommes existent en Chine. Certes si elles acceptent de tout faire, les femmes peuvent réussir là ou les françaises n’arrivent que difficilement, tout en haut de la pyramide.

Mais j’ai aussi rencontré durant mon voyage des activistes qui oseront dire que ce pays traditionnaliste et paternaliste depuis des millénaires n’a pas changé et que les riches chinois ont toujours des maitresses comme au temps de la cour impériale. Avec une hiérarchie très chinoise. femme dans la Chine

Ce pays, comme tant d’autres, voit sa population vieillir et la politique du second enfant est l’une des réponses à cette question économique. Sauf qu’en Chine selon le China Daily du 9 mars 2016 élever un enfant coûte en moyenne 91 800 dollars. Alors pour beaucoup, un enfant cela suffit.

Certaines jeunes femmes me feront remarquer qu’il est déjà difficile d’être enceinte une fois dans une entreprise, alors deux seraient trop discriminantes. Aujourd’hui la force de travail chinoise comprise entre 15 et 59 ans compte 700 millions de personnes, elle en comptera 940 millions en 2050. Ce qui sera insuffisant. La population touchera un pic en 2030 avec 1 milliard 45 personnes pour alors commencer à baisser.

La génération Y voire Z voudrait bien changer la société chinoise et ses traditions

L’égalité entre les femmes et les hommes existe néanmoins pour certaines femmes si elles sont aidées et qu’elles acceptent de travailler beaucoup. Comme tous les chinois d’ailleurs. Dans l’Université de Chengdu, lorsque je termine mon débat il est 20h30 et tous les étudiants sont encore en train de travailler dans les salles de classe. Cette génération de 20 à 23 ans se pose les mêmes questions que les jeunes européens mais ils savent d’ores et déjà que leur environnement est et reste plus difficile.

Pourtant leur volonté de changer la société est bel et bien là. Mais comment faire face à cette pression dans un environnement où l’argent est roi et où l’harmonie doit être respectée avant tout. Mon voyage en Chine me démontre que cette génération a grandi dans l’égalité et les questions des garçons sont aussi pertinentes que celles des filles. Cette génération préfigure t’elle les changements qui arriveront forcément dans un pays où la nécessité économique pourrait faire pression vers une égalité professionnelle en attendant une égalité réelle ?

*« Chinoises au XXIè siècle : ruptures et continuités » sous la direction de Tania Angeloff et Marylène Lieber. (Edition La Découverte)

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