Elisabeth Moreno : forger son destin

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Avec son style à la Michelle Obama, Elisabeth Moreno, aujourd’hui directrice générale de Hewlet Packard pour toute l’Afrique, est une femme qui ne passe pas inaperçue lorsqu’elle s’exprime sur les questions d’égalité entre hommes et femmes au sein du Women’s Forum for Economy and Society à Paris . Car elle incarne ces combats : femme, noire, immigrée, elle a dû se battre pour arriver là où elle est. Portrait d’une femme qui a su se forger un destin !  

Tout commence pour elle, il y a 50 ans au Cap vert, le pays est alors une colonie portugaise, avant que la révolution des Œillets ne vienne tout balayer sur son passage. 

Pour Elisabeth, ce passé colonial sera structurant dans sa vie : « Déjà les femmes en Afrique ne sont pas libres mais là vous êtes encore moins libres, ce sentiment qu’il fallait quasiment demander la permission pour respirer, c’est ce qui m’a construit dans mon enfance. »  

Elisabeth Moreno : forger son destin

Guide Dev Persot

Dès lors, elle n’aura de cesse de vouloir se libérer des carcans qu’elle a vécu dans son enfance afin d’aller au bout de ses rêves.

Pourtant, quand elle arrive en France, à Belleville, une banlieue triste qui n’est pas encore le quartier bobo d’aujourd’hui, elle sait déjà qu’elle devra se battre pour choisir sa vie :

« Quand on nait fille en Afrique, on est contraint par les gens qui nous aiment le plus : nos familles qui veulent le meilleur pour nous. On vous apprend ce que vous devez être, qui vous êtes n’a pas d’importance. ».

Pourtant, un ami de la famille remarque tout de suite le potentiel de la petite fille et lui glisse ces mots qu’elle n’oubliera jamais : « Tu peux rêver plus grand mais n’oublies pas que tu es une jeune fille noire dans un monde blanc, si tu veux réussir accroches toi à tes études. » Et elle le dit aujourd’hui : « Cet homme m’a sauvé la vie ! »

Quel aurait été son destin autrement ? « Je devais être une bonne fille, une bonne mère, une bonne épouse, voilà ce à quoi j’ai été élevée. » Prendre confiance en elle et en sa capacité à changer sa destinée c’est ce que cet homme, ce « savant fou » comme elle l’appelle, lui a permis d’envisager : « Mon chemin a été de quitter ces contraintes pour construire l’espace dans lequel j’avais envie d’évoluer et la personne que j’avais envie d’être. Il n’y a rien de plus difficile de se détacher de ce à quoi vous êtes destinée. »

Dès ce moment-là, elle sait que ce sont les études et cette soif d’apprendre en permanence qui lui permettront de se forger ce destin auquel elle aspire. « Encore maintenant, je me dis avant de me coucher : qu’est-ce que j’ai appris de nouveau aujourd’hui. Je crois sincèrement que c’est la raison pour laquelle je suis là où je suis aujourd’hui. »

Eprise de justice elle se tourne naturellement vers des études de droit après son bac avec un but : défendre les plus démunis pourtant elle perd vite ses illusions au contact de l’organe judiciaire. Défendre des personnes ou des entreprises qui ne sont pas en accord avec ses valeurs, ce n’est pas son truc ! « J’aurais dû devenir juge mais à l’époque, je ne pouvais reprendre mes études, je devais travailler. »  Elle le deviendra finalement des années plus tard : juge consulaire ! Aller au bout de ses envies, telle est l’une des marques de fabrique d’Elisabeth Moreno.

Cet abandon de la chose judiciaire sera finalement salutaire pour la suite… Elle fonde une entreprise de bâtiment avec son mari et apprend les rudiments du Business et du droit des affaires. Sept années plus tard, c’est forte de ces compétences acquises qu’elle prendra un nouvel envol en intégrant le pôle Nouvelles technologies de France Telecom puis DELL, Lenovo et aujourd’hui Hewlett Packard dont elle dirige l’Afrique depuis Johannesburg ! Elisabeth Moreno

Transmettre et faire grandir les potentiels  

Vivre plusieurs vies, ne pas penser que les jeux sont faits d’avance, c’est ce qu’elle tente de transmettre aujourd’hui aux jeunes. Parler de son histoire pour en inspirer d’autres :

« Je n’osais pas parler avant mais je me rends compte que c’est vraiment important aujourd’hui quand des jeunes femmes viennent me voir et me disent merci de nous montrer que c’est possible. »

Au sein de son entreprise, elle œuvre aussi pour que les femmes soient plus visibles au sein du management : « Je coache, je donne des objectifs à mes managers pour qu’ils coachent et développent les femmes de mon organisation. Lors de la revue annuelle, je regarde la manière dont les augmentations de salaires ou les stocks options sont donnés et m’assure qu’il n’y ait pas de femmes oubliées. De même, quand nous avons une remise annuelle, je m’assure qu’il y ait autant de de femmes que d’hommes. Cette bataille n’est pas une bataille des hommes contre les femmes, c’est une bataille pour que les femmes qui manquent considérablement de confiance en elles osent prendre la lumière. »

Les femmes d’Afrique : son autre combat

Née en Afrique, elle y est revenue à la faveur de son poste chez Hewlet Packard. C’est sur ce continent plein de défis mais aussi d’opportunités qu’elle souhaite désormais oeuvrer pour les femmes tant certaines situations la révolte: “L’Afrique est le continent où il y a le plus de femmes entrepreneures, elles sont 48%  mais seules 20% d’entre elles sont salariées. Ce sont celles qui travaillent le plus les terres mais moins de 20% en possèdent.” 

“Les femmes africaines du fait de l’adversité à laquelle elles sont confrontées sont d’une force extraordinaire.” Note t’elle. Elle en est convaincue: “ce sont les femmes qui vont faire la différence en Afrique.” Avec un “role model” comme elle, c’est une évidence. 

Véronique Forge Karibian 

 

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