Covid 19 & digitalisation : la prise de conscience brutale (et nécessaire) des entreprises

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Avec la mise au télétravail forcée de millions de salariés, les entreprises ont dû accélérer leur digitalisation de manière brutale. Mais où en sont-elles de ce processus dans l’hexagone ? Le point de vue tranché d’Arnault Chatel, speaker en IA et responsable pédagogique du #MBADMB de l’EFAP en partenariat avec le Hub Institute (premier Digital Think Tank Français).

Tout le monde annonce la digitalisation accélérée tant des entreprises que des instances publiques. C’est au moins l’un des bénéfices que l’on tirera de cette crise sanitaire ?

Arnault Chatel : Outre le fait que nous soyons face à une catastrophe sanitaire, nous allons aussi affronter une catastrophe économique. Effectivement, le seul bénéfice que j’y vois, c’est que les structures ont pris conscience –de manière brutale- de la nécessité vitale de se transformer. Au MBADMB, nous formons  des jeunes et des moins jeunes et je constate que pour beaucoup d’entreprises, y compris des pureplayer, le télétravail n’est absolument pas une pratique courante. Et du jour au lendemain, les sociétés ont dû basculer à 100% dans ce mode. Sans oublier que 70% des entreprises françaises sont des TPE ou PME qui sont encore moins avancées sur le sujet de la digitalisation.

Pour les entreprises, la question est de savoir si elles pourront aussi continuer à être opérationnelles alors que l’on attend certainement d’autres pics épidémiques ?

Arnault Chatel : Très clairement. Après bien sûr, cela est plus simple dans certains secteurs comme le digital. En revanche, il existe encore de grandes zones blanches en France où le débit est très mauvais, ce qui prive certaines régions reculées de nombreux talents. Pour les entreprises qui n’ont pas amorcé leur transformation digitale, ou qui ont des activités dans la production, cela va s’avérer plus compliqué. Toutefois, celles qui ont les reins solides en ressortiront grandies car elles auront pris de l’avance dans leur secteur. Et nous allons forcément nous remettre à consommer !

Pour ce qui est du télétravail, pensez-vous que nous allons toutefois commencer à en voir les limites ?

Arnault Chatel : Bien sûr. De plus, beaucoup d’entreprises n’ont pas compris que ce n’était pas du télétravail mais une période de confinement, et elles ont donné parfois la même charge de travail voire plus à des mamans isolées par exemple. De notre côté, en tant qu’école, nous avons basculé en 48H dans le full online. Tous nos professionnels ont donc dû se former à des outils comme Teams (Microsoft). Mais il est clair que ce n’est pas la même chose de donner des cours en face à face que sur ces plateformes interactives. Il faut absolument être dans le participatif afin de capter l’attention des élèves. De mon côté, je prône le e-learning mais il est clair qu’il faudra toujours jongler entre le virtuel et le présentiel.

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Quelles entreprises ont finalement le plus intérêt à se digitaliser pendant cette période ?

Arnault Chatel : Aujourd’hui, plus aucune entreprise ne peut en faire l’économie sous peine de couler. D’une part, car c’est une question de survie, d’autre part, car les jeunes n’ont pas envie d’aller travailler dans des entreprises archaïques. Ces derniers sont déjà très sensibles à leur qualité de vie, et il est clair qu’avec le Covid 19, beaucoup ne vont plus vouloir vivre à Paris ou du moins se déplacer tous les jours dans l’entreprise. Alors pour les sociétés qui sont totalement organisées autour du présentiel, cela va être compliqué. Il faut réellement un mix des deux.

Et pour les marques « digital natives », le commerce en ligne va encore s’accélérer ?

Arnault Chatel : Effectivement, on a toujours besoin de consommer, et les ventes en ligne ne vont faire que s’accélérer. Il faudra bien sûr augmenter la R&D sur les questions de livraison autonome. Le coronavirus va avoir de nombreux impacts qui seront intéressants à analyser d’un point de vue anthropologique. Nous sommes dans un pays conservateur où le changement est compliqué. Et il aura fallu une catastrophe pour faire bouger les lignes.

Quels sont les secteurs de l’entreprise les plus impactés par la nécessité de se digitaliser ?

Arnault Chatel : Si l’on reprend la chaîne de valeur de Porter, on voit que lorsque la digitalisation est en marche, la première chose perceptible pour le consommateur c’est la commercialisation. C’est pour cela qu’Amazon a écrasé tout le monde. Mais pour que cette partie soit effective, il faut que les autres parties de la chaîne soient digitalisées afin de suivre l’augmentation des ventes (distribution, logistique, production, métiers support…). Pour cela, le Chief Digital Officer doit avoir la confiance et l’appui de sa direction. La digitalisation doit devenir la priorité n°1 de l’entreprise.

Quels conseils donneriez-vous aux entreprises qui doivent entamer une forte phase de digitalisation ?

Arnault Chatel : De s’entourer de personnes qui disposent de cette expertise de la transformation digitale. Il s’agit d’une vraie compétence qui ne s’improvise pas. Ensuite, il est essentiel de se former et de former les collaborateurs. Souvent, les entreprises se concentrent sur la technologie ce qui n’est pas faux, mais le premier “chantier” c’est l’acculturation des collaborateurs. S’ils perçoivent cette transformation comme un ennemi ou une surcharge de travail, ils ne l’intégreront pas. Pour terminer, je dirais que nous parlons ici uniquement de digitalisation, mais la vraie transformation, c’est l’IA qui sera bien plus impactante !

Propos recueillis par Paulina Jonquères d’Oriola

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