Quel est l’ADN de Maria Schools ?
Agnès Alazard : Maria Schools, c’est la maison du life long learning, à la fois en présentiel et en ligne. Nous avons plusieurs écoles qui sont toutes spécialistes d’une compétence, d’un métier, d’un état d’esprit ou d’une culture. Chacune possède sa propre identité mais toutes partagent le même framework.
- La pédagogie du faire. C’est à dire que nous sommes peu dans la théorie et beaucoup plus dans la pratique. Nous challengeons sans cesse nos professeurs dans un soucis de performance. Si leur cours n’est pas bon, nous le leur disons ! D’ailleurs, il ne s’agit que de professionnels qui sont très opérationnels dans leur domaine : CPO, CTO, entrepreneurs…
- Le care. A l’heure actuelle, il est très facile d’accéder à des contenus pédagogiques de qualité sur le net. Mais nous considérons qu’il est faux de croire qu’il est facile d’apprendre. Non, l’apprentissage est douloureux, on peut se sentir nul, dépassé voire humilié. C’est pourquoi nous avons développé une pédagogie de proximité afin d’autoriser cette vulnérabilité.
- La communauté. A l’ère du numérique, il est essentiel d’être parfaitement connecté. Or, lorsque l’on suit une formation continue, il n’existe pas de communauté d’alumni. A l’inverse, chez Maria Schools, nos élèves repartent avec 50 voire 70 contacts pertinents qu’ils pourront actionner à la suite de la formation.
Pourquoi avoir choisi le prénom Maria ?
Agnès Alazard : Nous sommes très inspirées par la pédagogie de Maria Montessori, basée sur l’autonomie et la liberté. Elle a totalement disrupté l’éducation des enfants, et c’est ce que nous voulons apporter à la formation pour adultes.
Selon vous, les formations continues dans le numérique ne sont pas adaptées aux défis contemporains ?
Agnès Alazard : Nous savons tous que nos carrières ne sont plus linéaires, et que la plupart des métiers que nous exercerons dans 10 ans n’existent pas encore. Mais en arrêtant d’apprendre à 25 ans, nous sommes mal équipés pour affronter un monde professionnel plein d’incertitudes. Les CEO sont souvent conscients qu’il faut conduire une vraie transformation, mais ils font face à pas mal de résistance au niveau des équipes car cela génère légitimement de l’inquiétude.
C’est ce constat qui a amené mon associée Annabelle Bignon à rejoindre The Family pour créer des passerelles entre les grands groupes et l’écosystème entrepreneurial. Puis elle a co-fondé Lion en 2017, l’école de l’ère entrepreneuriale afin de transmettre le bon mindset, que l’on soit employé d’un grand groupe, d’une petite entreprise ou d’une startup. J’ai rencontré Annabelle en découvrant Lion, et cette expérience a bouleversé l’image que j’avais des formations pour adultes.
Nous nous sommes associées avec la volonté de continuer à développer Lion tout en montant d’autres écoles : Maestro, l’école des Product Managers, et bientôt Hero, une école de la narration. Et nous avons plein d’autres projets pour Maria Schools : une école de l’éthique digitale, du no code (tout ce que l’on peut faire sans être ingénieur), une école de data, de sales…
Vous avez passé 8 années à très haute responsabilité chez Aufeminin.com : qu’en avez-vous retiré dans la conduite de votre projet ?
Agnès Alazard : Chez Aufeminin.com, j’ai appris le goût de l’indépendance et de la liberté. En étant en recherche constante d’innovation, nous gagnions notre liberté. Même si l’entreprise était très profitable, nous avions toujours cette impression d’être au bord de la falaise : l’arrivée d’un nouveau concurrent que l’on n’avait pas vu, les GAFA, l’apparition de la publicité en programmatique, l’explosion des réseaux sociaux…
Changer de regard, ne rien prendre pour acquis, se poser les bonnes questions : je pense qu’Aufeminin.com a eu une trajectoire incroyable ces dernières années car les équipes ont su sans cesse s’adapter. Nous testions beaucoup de choses, avec des réussites et des échecs.
Cette liberté s’exprimait aussi dans l’audace que nous voulions transmettre aux femmes afin qu’elles s’autorisent à vivre la vie qu’elles voulaient. Enfin, l’aspect communautaire d’Aufeminin.com m’a beaucoup marquée. Sur les forums, les femmes se soutenaient de façon incroyable, cela leur donnait du courage. Nous n’étions pas un média qui défendait un éditorial fort mais plutôt une communauté, et j’en étais très fière. A l’échelle d’une entreprise, quand on est dans cette approche très collective, on se sent plus en confiance pour affronter les difficultés.
Pourquoi avoir fait le saut de l’entrepreneuriat après avoir quitté Aufeminin.com ?
Agnès Alazard : Quand la société Aufeminin.com a été vendue à TF1, je me suis rendue compte que j’avais un attachement très fort à l’entreprise, à tel point que j’en avais oublié mon statut de salariée. J’ai essayé de retrouver cette expérience en rejoignant une startup, mais j’ai réalisé que j’avais envie de monter mon propre projet. Cependant, je ne voulais pas être seule. Rencontrer Annabelle a été une vraie chance. Aujourd’hui, chez Maria Schools, nous ne sommes que 10 mais je retrouve la culture qui était la mienne.
Quelles sont vos figures d’inspiration ?
Agnès Alazard : Marie Laure Sauty de Chalon, ex PDG d’Aufeminin.com, qui m’a appris que l’on pouvait avoir un très fort niveau d’exigence tout en s’amusant beaucoup. C’est une femme pleine d’audace qui n’a peur de rien. Elle m’a aussi montré que l’on pouvait lier sa vie professionnelle à un engagement fort. Ma première boss, une écossaise, m’a aussi beaucoup apporté : elle m’a appris la persévérance et la résilience.
Bien sûr, j’ai aussi des inspirations plus personnelles comme ma mère et ma fille, ou encore des livres et films. Chaque fois, j’essaie de challenger mon regard. Quand je sens que trop de gens pensent la même chose autour de moi, ça m’angoisse ! Je suis donc sans cesse en quête de différence. Je crois que d’une manière inconsciente, je cherche à m’entourer de personnes qui me donnent envie d’être meilleure.
Propos recueillis par Paulina Jonquères d’Oriola