Quitter le salariat pour la liberté : mode d’emploi

De plus en plus de personnes cherchent à s’émanciper des contraintes du salariat, Stéphane Truphème, entrepreneur et auteur du livre “Quitter le salariat, travailler en liberté”, nous offre une réflexion profonde sur les enjeux et les défis du travail indépendant. Fort de son expérience et de ses rencontres avec de nombreux solopreneurs, il dévoile dans cet entretien les principales leçons à tirer lorsqu’on décide de franchir le cap de l’entrepreneuriat individuel. Organisation, discipline, recherche de clients, et surtout quête de liberté sont au cœur de cette aventure. Mais cette liberté est-elle vraiment accessible ? À quel prix ? Stéphane Truphème nous éclaire sur ces questions fondamentales et nous livre ses conseils pour réussir à travailler selon ses propres règles.

Quels sont, selon vous, les plus grands défis auxquels on est confronté lorsqu’on quitte le salariat ?

Stéphane Truphème : Je vois deux principaux défis.

Le premier est celui de l’organisation et de l’autodiscipline. Lorsque nous sommes salariés, nos horaires de travail sont encadrés. Même s’il y a une certaine flexibilité, nous sommes tenus contractuellement à effectuer un nombre d’heures de travail. Lorsque l’on est freelance, indépendant ou solopreneur, il n’y a plus de contrat qui nous oblige. Nous sommes face à nous-mêmes. Le risque est de se laisser distraire par diverses occupations : regarder des séries sur Netflix, faire du shopping, surfer sur TikTok… L’inverse est également vrai. Il y a beaucoup d’indépendants qui s’épuisent à la tâche parce qu’ils travaillent trop et ne savent pas trouver le bon équilibre en vie pro et vie perso. Il faut donc instaurer des routines et des horaires relativement encadrés pour travailler, et cloisonner le plus possible ses activités professionnelles et personnelles.

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Par exemple, travailler dans un espace de coworking permet de séparer son environnement personnel et professionnel.

Il faut également être très vigilant sur son organisation quotidienne. Lorsque l’on est salarié, notre agenda est “automatiquement” rempli par sa hiérarchie, ses collègues de travail ou encore des clients ou des partenaires, entre autres. Lorsque nous sommes indépendants, nous remplissons nous-mêmes notre agenda. Il n’y a rien de pire que de se lever le matin et de ne pas avoir une idée claire du déroulement de sa journée de travail. C’est la garantie de procrastiner, d’avoir l’impression de ne pas avancer et finalement de culpabiliser. Je n’ai jamais été particulièrement à cheval sur l’organisation, mais j’ai appris à le faire car c’est vraiment une condition primordiale à la réussite. Il existe plusieurs techniques relativement simples à mettre en œuvre. J’en parle dans mon livre “Quitter le salariat, travailler en liberté”.

Le second défi auquel on doit faire face lorsqu’on est indépendant est de répondre aux trois questions suivantes : quoi vendre ? À qui vendre ? Comment vendre ? N’importe qui peut développer une entreprise individuelle grâce au digital. Le modèle du freelancing est en forte croissance. Les revenus et les marges bénéficiaires des meilleurs solopreneurs dépassent bien souvent certains gros salaires dans des multinationales. La société s’adapte désormais progressivement à cela. Tout le monde peut être un entrepreneur. Les réseaux sociaux constituent la nouvelle “Entreprise”, et les marques personnelles en sont les “Salariés” sans employeurs. Il n’a jamais été aussi facile de lancer son business, mais la concurrence n’a jamais été aussi forte. Les techniques, tactiques et méthodologies pour développer une activité pérenne ont totalement changé au cours des 15 dernières années.

Vous parlez de la “liberté” comme motivation centrale pour quitter le salariat, est-on vraiment libre ? (problème de financement, Business développement peut-être du temps…)

Quitter le salariat, travailler en liberté - Stéphane Truphème (Ed. Eyrolles)
Quitter le salariat, travailler en liberté – Stéphane Truphème (Ed. Eyrolles)

Stéphane Truphème : Il y a deux motivations principales pour devenir indépendant. La première est de gagner beaucoup d’argent. La seconde est de travailler selon ses propres règles.

Cet angle m’intéresse tout particulièrement. Tous les freelances et solopreneurs avec qui j’ai discuté mettent la liberté comme leitmotiv numéro 1. Bien évidemment, une discipline importante conditionne la liberté. Cela implique de nombreuses heures de travail, des risques de ne pas y arriver, des rémunérations beaucoup plus aléatoires qu’un salaire lorsque l’on se lance… Bref, la liberté n’est pas de tout repos. Elle a un prix !

Mais comparez-la à des relations parfois toxiques avec ses collègues de travail ou pire avec son boss, des trajets souvent longs et routiniers, des progressions de carrière limitées, le manque d’autonomie et de reconnaissance, l’absence de choix sur ses projets, la routine et l’ennui, l’obsolescence rapide de nos compétences, les difficultés à concilier vie pro et perso, le stress lié à la politique, les jeux de pouvoir… Ajoutez à cela que le salariat n’est pas non plus une garantie de sécurité absolue. Vous obtenez un cocktail qui peut devenir rapidement nauséabond.

Les promesses de “belles carrières” se heurtent désormais au sens que nous voulons donner au travail. Cette contestation prend la forme du freelancing, du solopreneuriat, du mouvement des mompreneurs, des startupers ou encore de l’économie de la création et des infopreneurs. En fait, ces différents courants ne font qu’un. Les aspirations qui les gouvernent sont la liberté, l’autonomie et le sens que nous souhaitons donner à nos vies.

Dans mon ouvrage, je conseille aux personnes qui souhaitent rester dans le confort du salariat de développer malgré tout une activité parallèle pour gagner en liberté et en “employabilité”. De plus en plus de salariés optent pour cela. Le salariat n’est pas un problème en soi tant que l’on apprend de nouvelles choses, que sa rémunération augmente, que l’on progresse et que l’on y prend du plaisir. Si une ou plusieurs de ces conditions disparaissent, il n’est pas totalement stupide de tenter l’aventure en solo.

Comment trouver son job idéal ? (méthodes, etc…)

Stéphane Truphème : La question est au cœur de l’ouvrage. Il y a plusieurs moyens de trouver son job idéal. Il faut commencer par définir sa vision et identifier ce qui vous motive profondément, au-delà de l’argent ou de la reconnaissance. Par exemple, demandez-vous comment vous souhaitez changer le monde ou améliorer une situation qui vous tient à cœur.

Réfléchissez aux offres que vous pourriez proposer pour concrétiser cette vision. Comment votre expertise peut-elle être mise à profit pour créer vos offres ? Utilisez ce que vous avez accompli et les résultats obtenus par le passé dans votre ancien job pour créer vos offres. Si vous avez une passion, demandez-vous comment l’exploiter pour créer vos offres. Si vous n’avez ni expertise, ni résultats, ni passion, il faut d’abord rechercher, sur un marché donné, une situation qui n’est pas optimale et pour laquelle des insatisfactions ou des frustrations clients demeurent. Ensuite, il faut tenter de les résoudre. Si vous y arrivez, vous tenez votre première offre.

Il faut également identifier votre “niche”. Cela consiste à déterminer un segment de marché spécifique auquel vous souhaitez vous adresser. N’ayez pas peur de choisir une niche qui semble “trop petite”. Il est plus facile de se démarquer sur un marché restreint. Racontez l’histoire de votre client idéal. Mettez-vous à sa place et imaginez son parcours. Quels sont les défis qu’il rencontre ? Comment recherche-t-il des solutions ? Pourquoi la vôtre est-elle la plus adaptée ? Décrivez l’état idéal qu’il atteindra grâce à votre offre. Ensuite, il existe des techniques pour tester son offre, trouver ses premiers clients, développer sa marque personnelle et se rendre visible pour vendre. Le livre détaille tout cela.

Quels conseils donnez-vous pour créer une offre “irrésistible” comme vous le dites ?

Stéphane Truphème : Il faut d’abord prendre conscience que les audiences sont sursollicitées. Nous sommes toutes et tous bombardés d’informations, de contenus, de propositions commerciales en tout genre. Par exemple, dire “je suis consultant en marketing digital” n’a plus aucune portée.

Pourquoi ? Le client ne comprend pas immédiatement ce que vous pouvez concrètement lui apporter, c’est beaucoup trop vague. Or, il n’a pas de temps à vous consacrer et ne se donnera pas la peine de faire les efforts nécessaires pour comprendre comment vous pourriez l’accompagner. De plus, si vous effectuez une recherche sur LinkedIn pour trouver un “consultant en marketing digital”, vous obtiendrez des milliers voire des centaines de milliers de résultats. Il faut donc être en mesure de démontrer l’impact positif de votre offre sur la vie de vos clients. Il faut décrire clairement l’état initial du client (avant qu’il n’ait opté pour votre offre) et l’état final (après qu’il ait opté pour votre offre) qu’ils peuvent espérer atteindre grâce à votre solution.

Il faut être en mesure de communiquer efficacement sur la valeur de son offre :

  • Utilisez un langage clair et accessible. Évitez le jargon technique et adoptez un langage que votre public cible comprendra facilement.
  • Mettez en avant les bénéfices clients : au lieu de vous concentrer sur les caractéristiques de votre offre, mettez en avant les avantages concrets qu’elle procure.
  • Démontrez votre crédibilité en vous appuyant sur votre expertise, vos résultats, des études de cas, des témoignages clients et des preuves sociales pour renforcer votre crédibilité et instaurer la confiance.
  • Répondez aux objections : identifiez les doutes et les craintes de vos clients potentiels et répondez-y de manière claire et concise. Proposez des garanties, des témoignages et des arguments convaincants pour les rassurer.
  • Utilisez le storytelling pour raconter des histoires captivantes. Cela créera une connexion émotionnelle avec votre public et rendra votre offre plus mémorable.

Il faut arriver à maîtriser beaucoup d’autres techniques qui permettent de rendre une offre “irrésistible” aux yeux de ses clients idéaux. Avec un peu d’entraînement, il n’y a rien de bien compliqué.

Comment trouver ses premiers clients ?

Stéphane Truphème : Plusieurs tactiques permettent de trouver ses premiers clients. Le plus simple est de commencer par son propre réseau en sollicitant d’anciens clients et des partenaires potentiels. Il ne faut pas hésiter à demander des mises en relation. Si vous connaissez quelqu’un qui connaît un client potentiel, faites-vous recommander !

Ensuite, il faut développer sa crédibilité et sa visibilité :

  • Démontrez votre expertise par les résultats. Utilisez vos propres réussites, les témoignages clients et des études de cas pour prouver l’efficacité de votre offre.
  • Misez sur le contenu pour asseoir votre autorité. Créez du contenu pertinent et de qualité qui répond aux questions de votre audience et vous positionne comme une référence dans votre domaine.
  • Utilisez la preuve sociale : les avis et témoignages clients sont des arguments puissants pour convaincre les prospects hésitants.

Il est également possible d’utiliser des techniques plus traditionnelles telles que la publicité ou la prospection téléphonique, par email ou sur les médias sociaux.

Comment mesure t-on sa réussite ?

Stéphane Truphème : La réussite en tant qu’indépendant ne se limite pas à des indicateurs financiers. La vision doit être globale et doit prendre en compte l’épanouissement personnel, la liberté et l’alignement avec ses valeurs. Il est important de maîtriser son temps. Est-ce qu’on est libre de choisir ses horaires de travail, ses projets et ses clients ? La liberté est une mesure importante du succès. Il est également important de contrôler ses choix stratégiques et la direction à donner à son activité. Il faut aussi parvenir à concilier son travail avec ses aspirations personnelles et ses engagements familiaux.

Enfin, il faut “mesurer” son épanouissement personnel et l’alignement avec ses valeurs :

  • Est-ce qu’on est satisfait par ce mode de travail ?
  • Est-ce qu’on y prend du plaisir ?
  • Est-ce qu’on est aligné avec ses valeurs ?
  • Est-ce que son activité a du sens ?
  • Est-ce qu’on acquiert de nouvelles compétences et connaissances ?
  • Et bien évidemment, est-ce que son activité est rentable et permet de dégager des revenus suffisants pour subvenir à ses besoins et atteindre ses objectifs financiers ?

La réussite en tant qu’indépendant est une notion subjective qui dépend de vos aspirations et de vos priorités. Il est important de définir vos propres critères de succès en tenant compte de l’ensemble de ces dimensions et d’adapter votre stratégie en fonction de vos objectifs personnels et professionnels.

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