L’intergénérationnel en entreprise, pourquoi ça marche ?

intergénérationnel

Alors que la fracture entre les générations semble se creuser chaque jour davantage, certaines sociétés ont pris le parti de miser sur l’intergénérationnel afin d’enrichir leur vision. Pour d’autres, il s’agit même de l’ADN de leur entreprise, à l’instar d’Armelle Riou et Marie Thévenet qui se sont associées alors qu’elles ont plus de 30 ans d’écart. Une démarche encore peu commune en France, et qui témoigne de la volonté de bousculer les codes. Car l’intergénérationnel, c’est avant tout innover !

« J’ai rencontré Armelle lors de ma propre orientation scolaire. J’étais bonne élève en S, et je ne savais absolument pas ce que je désirais faire. J’ai vécu ce que nos clients vivent tous les jours. Notre histoire, c’est avant tout un coup de foudre professionnel », raconte Marie Thévenet, co-fondatrice de Mental’O, entreprise leader dans le domaine de l’orientation des jeunes et des adultes, qui compte pas moins de 50 conseillers dans toute la France. Malgré leur 30 ans d’écart, les associées regardent dans la même direction et partagent le même enthousiasme, l’une des valeurs clefs de leur société. Suite à leur première rencontre, les deux femmes ne se sont jamais vraiment quittées.

L’intergénérationnel en entreprise, pourquoi ça marche ?

Alors qu’elle était encore étudiante, Marie a rejoint Armelle pour un stage au sein de Mental’O. A cette époque, Armelle Riou recherchait une personne avec qui s’associer. « Je cherchais avant tout quelqu’un de confiance et créatif. Un vrai partenaire de travail et de développement. Quand Marie est venue me proposer de devenir mon associée, j’ai considéré qu’elle était effectivement la personne la plus impliquée dans la société, et aussi de par son âge, la plus proche de nos clients », raconte-t-elle.

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Bien entendu, son entourage a tenté de l’en dissuader, « les banquiers se disaient que j’étais folle ! », s’amuse-t-elle. Mais, « monter une entreprise, c’est avant tout prendre des risques, sinon on ne fait jamais rien », aime à se rappeler l’Annécienne qui est aujourd’hui nommée au trophée des femmes de l’économie dans la catégorie femme chef d’entreprise prometteuse.

Des entreprises françaises qui peinent encore à changer leurs pratiques

En tant que président de l’Observatoire du management intergénérationnel, Marc Raynaud est un fervent défenseur du sujet. Ses enquêtes révèlent que plus de deux tiers des sociétés françaises considèrent aujourd’hui qu’il s’agit d’une thématique qu’il convient de prendre au sérieux.

Malheureusement, ce dernier regrette que peu d’initiatives concrètes soient mises en place dans les entreprises. « On fait beaucoup de séminaires, d’ateliers, pour faire reconnaître le sujet, mais hormis le recrutement par voie numérique, les entreprises n’ont généralement pas adapté leur politique, leurs pratiques et leur organisation pour que toutes les générations y trouvent leur compte (rémunération, formation etc).

Il existe par exemple encore une résistance très culturelle au développement du temps partiel ou du travail à domicile. Un jeune qui quitte son travail au bout de 2 ans est perçu comme un traitre par l’entreprise, alors qu’en Chine par exemple, on estime au contraire qu’il peut être un précieux allier en devenant un partenaire, ou en revenant plus tard dans la société avec de nouveaux contacts », illustre le spécialiste. L’intergénérationnel 

Rompre avec l’approche monogénérationnelle

Point positif : depuis 30 ans, le tutorat et l’apprentissage se sont bien développés dans l’hexagone. Bien entendu, le partage de compétences se produit dans les deux sens. C’est ce que l’on nomme le « reverse-mentoring », avec des jeunes qui transmettent notamment leur culture numérique. Toutefois, tous les jeunes qui utilisent les réseaux sociaux ne sont pas forcément de bons pédagogues ! Dans le même temps, force est de constater que le fossé entre les générations se creuse et surtout s’accélère.

« Aujourd’hui, il peut arriver qu’un jeune de 30 ans ne comprenne pas un jeune de 20 ans », affirme Marc Raynaud. Selon lui, il est important que les entreprises cessent d’avoir une approche monogénérationnelle pour parvenir à dépasser ces clivages. « Je ne pense pas qu’une génération apporte plus qu’une autre, ce qui enrichit l’entreprise, c’est avant tout d’organiser la complémentarité. Il ne s’agit pas d’aider les dirigeants à manager la génération Z. Ce qui est intéressant, c’est de les faire travailler ensemble sur de vrais sujets de business. Le management doit faire preuve de plus d’humilité, il s’agit avant tout d’une approche participative », plaide le spécialiste.

Spécialiste de l’interculturalité, il a notamment évolué dans les pays scandinaves. Voilà déjà 30 ans que ces derniers ont décidé de confier des projets de premier plan aux jeunes en collaboration avec les anciens. A l’étranger, certaines entreprises ont  innové en créant des comités de direction composés de jeunes. Ces derniers planchent sur les mêmes thématiques que le vrai comité de direction et vont ainsi pouvoir donner leur avis sur des questions fondamentales avant le conseil.

De la même façon, Armelle et Marie ne partagent absolument pas une relation de mentor-mentoré ou de mère-fille. Mais véritablement une relation de partenaires. « Même quand Marie était en stage, je lui montrais tous les comptes. Nous travaillons véritablement côte à côte au quotidien », rapporte Armelle. « Ensemble, nous parvenons à trouver un vrai équilibre dans la prise de décision. De mon côté, je suis parfois du genre à m’emballer, ce qui impulse aussi une certaine énergie, et Armelle, de par son expérience, va aussi me résonner », explique Marie.

Osez l’intergénérationnel !

Quand on parle d’intergénérationnel, on parle donc bel et bien d’innovation, de changement des pratiques. En France, l’association TIGcRE met en relation des jeunes et des moins jeunes souhaitant s’associer. Outre le bel exemple d’Armelle et Marie, Marc Raynaud rappelle que l’une des plus grandes entreprises au monde, Google, a aussi misé sur l’intergénérationnel lors de sa création.

Ses deux jeunes fondateurs, Larry Page et Sergueï Brin, ont fait appel à Eric Schmidt alors âgé de 44 ans, qui est devenu leur PDG de 2001 à 2011, avant que Larry Page reprenne les rênes de l’entreprise. Pour Marc Raynaud, il est important que les sociétés osent aujourd’hui rompre avec les pratiques d’hier, les multiples process et la hiérarchie qui déresponsabilisent et brident la créativité. « Plutôt que de faire un entretien de fin d’année, pourquoi ne pas plutôt organiser un meeting de 15 minutes chaque semaine au café du coin ? », lance-t-il.

Autre idée : demander à l’équipe de recruter elle-même le collègue qui leur manque en leur soumettant 4 profils présélectionnés. De son côté, Marie Thévenet lance un appel : « Ne formulez pas de stéréotypes sur la génération Y du type : ils vont mettre le bazar dans l’entreprise. C’est surtout une question de personne. Entrer en contact avec différentes générations permet avant tout de créer de la valeur ». Quittons-nous sur ces sages paroles !

@Paojdo

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