La Contrie : les secrets d’un succès “made in France”

La Contrie

Fondatrice de la marque de maroquinerie La Contrie, Edwina de Charette propose des sacs sur-mesure entièrement fabriqués dans son atelier parisien. Elle nous raconte son parcours semé d’embuches mais aussi ses succès, avec un franc-parler rafraîchissant !

Le goût des belles choses, l’œil capable de repérer les meilleures matières, Edwina de Charette de La Contrie le tient d’une famille « aristo-industrielle-bourgeoise » qui lui a offert une enfance privilégiée à Paris. « Nous étions plutôt du genre low-profile, à ne pas rouler dans des voitures clinquantes, mais nous avions toujours des chaussures de qualité et vivions dans de beaux appartements », se souvient-elle. Enfant, la créatrice accompagne ses parents se faire fabriquer sacs, vêtements et costumes sur-mesure.

Avant de lancer La Contrie, Edwina travaille tout d’abord en maison de disques, en France et aux Etats-Unis, puis chez Nova production avant de rejoindre Thierry Ardisson pour devenir rédactrice en chef pour Paris Dernière. « J’adorais mon job mais c’était un boulot de dingue, et étant assez terrienne, j’ai du mal à ne pas faire parfaitement les choses. Il était aussi difficile de gérer les égo de chacun », explique-t-elle. S’en est suivie une pause de plusieurs années, impulsée aussi par des problèmes familiaux, un mariage et un enfant.

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« L’idée de lancer La Contrie ne m’est pas venue comme ça. C’est en voulant me faire faire un sac sur-mesure avec un cuir spécifique (veau lisse) que je me suis rendue compte que c’était extrêmement compliqué. J’ai mis un an à le réaliser », se souvient-elle. En 2011, après avoir rencontré différents artisans-maroquiniers, Edwina de Charrette décide finalement de lancer sa propre maison avec l’idée de devenir un véritable « tailleur de sac », sur le modèle de Savile Row, la rue des tailleurs à Londres.

« Le problème, c’est que les gens veulent souvent des langoustines au prix des crevettes »

Ses sacs, en cuir de grande qualité, sont entièrement personnalisables : couleur des coutures, poignées, bandoulières… et surtout, ils sont entièrement faits-main dans son atelier-boutique. Bien entendu, vouloir produire 100% français, c’est se heurter à un coût du travail bien plus élevé que chez certains voisins européens, et à des artisans qualifiés qui ont eux-aussi leurs propres prétentions salariales. « En France, le moindre sac qui me coûterait 200€ me reviendrait à 50€ au Portugal. Tous les jours, j’ai la possibilité de produire ailleurs en quantité et pour moins cher. Mais ce n’est pas ce que je désire », explique-t-elle.

img_8400Cette année, la fondatrice de La Contrie a fait vivre plus de 10 personnes, mais après 5 ans d’existence, elle n’est toujours pas salariée de sa propre entreprise. « Je plomberais ma boîte avec toutes les charges, et en plus, j’estime que mon travail mérite amplement plus de 2000€. Mais me salarier est bien entendu mon objectif car c’est presque malsain de ne pas se rémunérer. Monter sa boîte, c’est génial, mais on y laisse notre santé, notre cerveau, notre quotidien », confie-t-elle. Sans cesse, il faut montrer patte blanche aux banquiers, clients, collaborateurs. Pour autant, pas question de céder aux avances des grands groupes, la jeune femme tient à rester indépendante.

Edwina entend donc accroître son chiffre d’affaires pour pouvoir enfin rétribuer son travail. Pour autant, « il n’est pas possible de marger encore davantage », explique la créatrice. Le prix moyen d’un sac sur-mesure est environ de 2500€. « Le problème, c’est que les gens veulent souvent des langoustines au prix des crevettes », s’amuse-t-elle. Et d’ajouter : « je dis souvent que je produis équitable… mais en France ! ». D’après elle, le made in France (le vrai !) nous questionne aussi sur notre manière de consommer. « Nous ne connaissons plus le vrai prix des choses quand elles sont produites dans l’hexagone. Moi-même, j’ai des dizaines de paires de chaussures quand nos grand-parents s’en offraient une pour presque une vie », soutient-elle.

« Entourez-vous, rencontrez d’autres entrepreneurs »

img_9936Des difficultés qui lui ont imposé chaque année « une crise existentielle », l’interrogeant sur la poursuite ou non de La Contrie. Mais la créatrice tient le coup, et cette dernière année lui a montré des signaux favorables. Elle a notamment lancé une gamme de sacs avec des cordons qui a rencontré un franc succès. « Mes sacs sont devenus branchés.. c’est bien mais mon objectif est avant tout d’être intemporelle », poursuit-elle. « Je suis aussi très soutenue par la presse », affirme-t-elle. La jeune femme peut se targuer d’avoir une vitrine au Ritz et une exposition en cours au Bon Marché. Plusieurs événements sont également à venir en septembre, comme un atelier éphémère chez Merci.

Alors que l’horizon s’éclaircit et que le succès se confirme, Edwina se souhaite de faire les bons choix pour l’avenir. Si elle devait donner un conseil aux prétendants à l’entrepreneuriat : « entourez-vous, rencontrez d’autres entrepreneurs car nous connaissons tous les mêmes difficultés. N’hésitez pas non plus à solliciter la chambre des métiers de votre secteur. Ils vous donneront de précieuses informations ».

@Paojdo

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