Julie Walbaum, CEO de Maisons du Monde, ou l’incarnation du leadership bienveillant

Maisons du Monde JULIE WALBAUM
Julie Walbaum dirige Maisons du Monde depuis juillet 2018. Sa feuille de route ? Atteindre 2 milliards de ventes d’ici 2024 tout en abaissant de 25% l’intensité carbone du géant de l’ameublement. Le tout en pratiquant un management inclusif et en assurant son rôle de mère auprès de ses 3 enfants en bas âge. Portrait d’une wonder woman des temps modernes.

Les qualificatifs qui nous viennent à l’esprit lorsque l’on rencontre Julie Walbaum ?  Humilité, calme et décontraction. Tout juste descendue de scène après être intervenue lors d’une plénière sur le Women’s Forum, elle nous accorde 30 minutes dans son agenda millimétré. Il faut dire que la jeune maman partage sa vie entre Nantes, où se situe le siège social de Maisons du Monde, et Paris, où résident son mari et ses trois enfants.

Une vie de funambule dont elle ne minimisait pas les difficultés lorsqu’elle a décidé de candidater au poste de CEO en 2018. « J’ai réfléchi avant de me lancer car je ne voulais pas que cette vie à cheval entre deux villes impacte mes équipes ou ma vie familiale », nous confie-t-elle. Une vraie montée en puissance dans la hiérarchie puisque Julie Walbaum était jusque lors Directrice Digital et Marketing client de l’entreprise. « Il y a eu un processus de recrutement interne et externe, j’ai porté ma candidature car j’y croyais, tout en sachant que je n’avais jamais eu d’expérience dans ce rôle », se souvient la dirigeante.

« Je ne me suis jamais considérée comme féministe »

Un statut de femme, de mère et de cheffe d’une grande entreprise dont elle n’avait jusque lors pas conscientisé la rareté. « Chez Maisons du Monde, les deux tiers de mes collaborateurs sont des femmes. Ce n’est vraiment que lorsque l’on touche aux postes à très hautes responsabilités que l’on constate leur absence dans les instances dirigeantes des grandes entreprises. Je ne me suis jamais considérée comme féministe, mais il se trouve que je suis une femme et donc si je peux en aider d’autres à se lancer en montrant que l’on peut avoir des enfants et être PDG, je le fais volontiers », nous confie-t-elle.

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« J’ai horreur du présentéisme »

Maman de trois enfants de 2, 4 et 8 ans, Julie Walbaum force le respect. Comment fait-elle pour tout concilier ? Tout d’abord, la CEO peut compter sur un « mari formidable » qui assure le coucher des enfants lorsqu’elle n’est pas à la maison. Et puis Julie Walbaum se fixe des règles : pas plus de deux soirs par semaine en dehors de la maison, ce qui implique souvent des levers très matinaux. « Quand je ne suis pas à la maison, je peux travailler tard, mais je ne retravaille jamais lorsque mes enfants sont couchés et que je suis chez moi. Passer du temps avec ma famille et mon mari me donne de l’énergie, et je pense aussi que cela me permet de prendre du recul sur mon travail », nous explique-t-elle.

Julie Walbaum demande également à ses collaborateurs de faire preuve d’une grande efficacité dans les réunions, mais aussi de travailler en autonomie, ce qui, un an et demi après sa prise de poste, semble avoir porté ses fruits. « Mes collaborateurs ne sont jamais gênés de poser un congé car ils savent que cela n’est pas mal vu. J’ai plutôt horreur du présentéisme. Dans un monde en pleine mutation, il y a un réel aplanissement de la hiérarchie dont les jeunes générations ont besoin pour co-construire les valeurs de l’entreprise », poursuit-elle.

« Nous devons mettre la barre plus haut »

Parmi les autres descriptifs de sa personnalité, on ne peut pas non plus omettre l’ambition. « Pour moi, l’ambition est essentielle, surtout dans le monde du retail qui est extrêmement compétitif. Nous devons mettre la barre plus haut. Il faut être motivé par la complexité car c’est grâce à elle que naissent les grands projets », lance-t-elle. Et parmi ces grands projets, on retrouve en tête de liste la réduction de 25% de l’intensité carbone de Maisons du Monde d’ici 2024.

« Pour moi, il est important d’énoncer ces objectifs car cela motive à les atteindre et pousse à l’innovation », ajoute-t-elle. Dans le même intervalle, Julie Walbaum doit aussi générer quelques 2 milliards d’euros de ventes. Pour ce faire, le groupe va chercher des moteurs de croissance comme le digital et l’international. L’entreprise va ainsi lancer une marketplace et proposer de nouveaux services notamment dans le conseil déco. Elle va également activer de nouveaux moteurs comme le B2B et son développement aux Etats-Unis.

Cet engagement pour l’environnement vient parfaitement s’aligner avec le vif intérêt porté par la CEO aux questions de RSE. « Au départ, je ne pensais pas forcément travailler dans le circuit privé, mais je mesure aujourd’hui ma chance de pouvoir embarquer positivement un grand nombre d’acteurs dans la démarche. Ce que j’aime dans le monde de l’entreprise, c’est que les boucles de décision sont plus courtes ».

Maisons du Monde a donc développé depuis plus de 10 ans une démarche éco-responsable et défini une feuille de route RSE ambitieuse. Cette démarche est également appuyée par la Fondation Maisons du Monde qui vient porter les engagements responsables et philanthropiques de l’enseigne autour de la protection des forêts. Maisons du Monde fait par ailleurs partie d’un collectif de 16 retailers engagés dans la lutte contre le changement climatique.

Les solutions pour abaisser la trajectoire carbone

Mais de quelle façon Julie Walbaum entend-t-elle atteindre de tels objectifs ? En tant que géant de l’ameublement, « nous avons défini une feuille de route appliquée à tous les métiers, sur l’ensemble de la chaîne de valeur, avec les achats comme levier clé », affirme-t-elle.  L’enjeu est donc de sourcer toujours plus de matières recyclées grâce à la mise en place de nouvelles filières avec les fournisseurs. Pour cela, l’entreprise a mis sur pied un plan financier avec un investissement de marge brute.

L’autre gros levier concerne le transport des produits de l’Asie vers l’Europe. Les marchandises sont affrétées par bateau mais le dernier km est bien souvent le plus optimisable au niveau du bilan carbone, c’est pourquoi Maisons du Monde tente d’améliorer ses plateformes logistiques d’approche. « Actuellement, nous testons l’approvisionnement en barge tout en continuant à optimiser le remplissage de nos camions. Nous expérimentons aussi les camions verts dans les grandes villes, et encourageons nos clients à récupérer leur colis en magasin.», rapporte Julie Walbaum. Enfin, l’enseigne a déjà réduit l’intensité énergétique de ses bâtiments de 17% entre 2016 et 2018. Dans le même temps, les émissions de gaz à effet de serre ont été réduites de 50% par l’achat d’électricité renouvelable qui alimente aujourd’hui 89% des magasins.

Protéger la santé des consommateurs

Souvent épinglé pour la présence de perturbateurs endocriniens dans les peintures ou les laques, le secteur de l’ameublement doit aujourd’hui opérer sa révolution verte. Chez Maisons du Monde, cela passe par la signature d’une charte relative aux conditions de travail mais aussi à l’utilisation de certaines substances chez ses fournisseurs. « Désormais, tous les 2 ans, 100% de nos fournisseurs stratégiques seront audités », explique Julie Walbaum.

Maisons du monde organise aussi des rencontres inter-fournisseurs afin que les plus avancés dans la démarche environnementale puisse expliquer comment cela a impacté positivement leur productivité et leurs retours financiers. « L’un de nos fournisseurs indiens, une femme, a ainsi raconté comment, en pérennisant ses équipes via des contrats équivalents au CDI, elle a pu accroître la qualité de sa production, ce qui nous a permis de diriger encore plus nos commandes vers son usine car nous savions que nous pouvions compter sur elle. » Au global, « la baisse de la trajectoire carbone crée un réel cercle vertueux pour le business », conclut celle qui entend bien « rendre l’impossible possible ».

Paulina Jonquères d’Oriola

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