Née à Shanghai et pionnière dans son genre, la plateforme en ligne Feiy est devenue l’une des références en matière d’entreprenariat social en Chine, et compte bien s’imposer comme telle dans le monde entier. Fondée sur la volonté de reconnecter le monde du travail avec la notion d’impact environnemental, Feiy met en relation des centaines d’intervenants tous secteurs confondus. Pauline Soudy, sa co-fondatrice, revient sur son aventure et nous livre sa vision du « digital for good ».
Feiy : Quand le digital se met au service de l’écologie
Diplômée d’une école de commerce, Pauline Soudy, jeune trentenaire, a débuté sa carrière dans le service communication de grandes entreprises européennes… et a très vite compris qu’elle n’y resterait pas. « Trop peu de créativité et de prises d’initiative » constate-t-elle. A l’instar des nouvelles générations, il lui faut être en accord avec les valeurs de l’entreprise dans laquelle elle travaille. Mais lors de cette période, elle a aussi pris acte de l’impact réel du business sur l’environnement. Une prise de conscience qui va la mettre sur les rails de sa propre carrière. Une ligne directrice renforcée par la découverte de l’entreprenariat social, grâce notamment à la lecture de 80 hommes pour changer le monde de Sylvain Darnil et Mathieu Le Roux[1], un ouvrage qu’elle qualifie de « révolutionnaire ».
Lorsqu’elle découvre Shanghai lors d’un stage d’étude en 2010, c’est le coup de cœur. Elle décide de s’y installer en 2014, pour y développer ses projets. Pauline, dans un premier temps, occupe un poste au sein d’un groupe pionnier de l’entreprenariat social français (Groupe SOS), et gère la liaison avec la Chine. Une opportunité qui lui permet de rencontrer l’ensemble des acteurs dans ce domaine, alors très restreint en Chine. En 2016, elle rencontre le fondateur de la plateforme Feiy, c’est le déclic : elle prend la relève.
Si Pauline a toujours eu une conscience écologique prononcée, son arrivée en Chine l’a renforcée : un quotidien à l’air souvent pollué, une eau non-potable, les scandales alimentaires, l’explosion du digital, etc. Elle s’attèle avec passion à sa nouvelle problématique : Comment fait-on du business d’une façon plus responsable ? En proposant une plateforme unique, afin de connecter l’ensemble des secteurs autour de l’éco-responsabilité, et de proposer experts, intervenants, services et workshops aux entreprises désireuses d’améliorer leur fonctionnement. Une plateforme facilitatrice qui crée une synergie autour de l’environnement et des pratiques pour l’améliorer. Une centaine d’entreprises sont actuellement connectées sur feiy, dont certains grands groupes tels que Club Med. Leur objectif est d’accéder aux réseaux mis à disposition, bénéficier de conseils, mais aussi découvrir de nouvelles stratégies.
Si d’autres plateformes du même type existent (Zero Waste, Bottle Dream par exemple) elles ciblent des domaines particuliers (déchets, eau, etc.). Feiy propose quant à elle une vision holistique, ce qui la rend unique. En Chine, le pari est gagnant : l’éco-responsabilité en est à ses débuts, tout y est à construire, et le digital est largement entré dans les usages. Mais Feiy tend à devenir une source d’inspiration également en Europe, même si la conscience écologique y est présente depuis plus longtemps. « Les employés veulent aujourd’hui trouver du sens dans leur emploi, pour s’y engager durablement. Cela ne concerne pas seulement la Chine… Avec Feiy, nous voulons créer le plus d’interactions possibles, devenir un marché d’idées et d’échanges, dans tous les domaines et l’ensemble des professions. »
L’écologie et le digital ? Un sujet central et urgent. Pour Pauline – mais aussi pour 73 % des Français[2] – l’impact écologique du digital est très mal connu. « L’idée est de faire la lumière là-dessus. L’écologie ce n’est pas juste trier ses déchets…. Mais le fond du problème relève plus des entreprises que des particuliers. Il faut donc toucher un maximum de personnes sur le rôle que les entreprises doivent jouer : celui de leader de solutions et d’alternatives ». Réinventer le système, créer de la valeur sans détruire. « Les entreprises ont la responsabilité de s’attaquer au problème. Ça doit être au cœur de leur fonctionnement car il s’agit de l’avenir » affirme Pauline.
De son côté, Feiy – qui signifie « voler » en chinois – continue de se développer de façon organique, sans précipiter son ascension. « Nous n’avons aucun investisseur pour subventionner la plateforme, elle vit des contrats obtenus avec les clients, elle repose donc sur une demande réelle ».
Lien : www.feiy.co
[1] Un tour du monde à la recherche d’hommes et de femmes exceptionnels : des entrepreneurs qui réinventent leur métier et créent des entreprises rentables pour construire le monde qu’ils souhaitent.
[2] C’est ce que révèle une étude menée par Occurrence pour l’ONG Digital for the Planet