Nina Bjornstad : le management collaboratif version Google

Nina Bjornstad

Comment Google veut révolutionner les entreprises traditionnelles?  En allant vers un management plus collaboratif et en utilisant ses différentes plateformes. “Evangéliser”, c’est la mission de Nina Bjornstad, Country Manager UK & Ireland chez Google @work. Elle nous explique sa philosophie technologique. Passionnant !

Quel est votre job en tant que Country Manager UK & Ireland chez Google@work ?

Nina Bjornstad : Nous essayons d’aider les entreprises à se libérer des pratiques traditionnelles et à prendre avantage des innovations d’aujourd’hui. Chez Google nous essayons d’imaginer ce qu’il est possible de faire grâce au pouvoir exponentiel de la technologie.  Dans nos vies nous le savons mais nous n’en prenons pas pleinement avantage dans les industries. Une grosse partie de mon travail consiste à éduquer les business et voir ce qu’il est possible de faire.

Comment les entreprises se préparent-elles à la disruption des startups ?

Nina Bjornstad : Aujourd’hui, il serait faux de penser qu’il y a une bonne réponse, tout est tellement volatile. Je pense que l’idée n’est pas d’avoir la bonne réponse ou de comprendre ce que sera la tendance mais d’avoir des méchanismes d’écoute et des employés qui soient capables de répondre aux changements. Je pense donc que ce que devraient faire les entreprises, c’est de s’assurer que ses équipes y compris ceux qui ne sont pas connectés puissent avoir une voix, que la hiérarchie des pouvoirs soit inversée et que le management ne pense plus qu’il doit dicter la stratégie mais que les employés se sentent participer activement à la création du futur. Car s’il y a bien une chose que l’on sait c’est que la “disruption” va venir de partout !

Mini Guide Leader

Comment donc réconciliez vous le Leadership et le principe collaboratif que vous décrivez ?

Nina Bjornstad : C’est un point très important et  je pense que beaucoup d’entreprises avec qui nous travaillons aujourd’hui en Grande Bretagne ont le courage de comprendre qu’en matière de leadership, elles ne sont pas les seules à détenir le pouvoir et la direction à suivre mais de prendre les “inputs” des employés. C’est une évolution du management. Le management n’est plus quelque chose qui implique une vision de l’avenir mais plutôt un méchanisme de réponse au pouvoir du collectif (des employés) , qui doit canaliser les idées et mettre des ressources et de l’énergie pour avancer.

Jusqu’à quel point donne t-on du pouvoir aux gens?

Nina Bjornstad : Il faut déjà leur donner une voix et qu’il y ait une communication dans les deux sens et deuxièment créer une connectivité. Aujourd’hui, beaucoup d’entreprises travaillent en silo. Il faut donner aux gens plus de visibilité et un environnement plus transparent en leur apportant plus d’informations et de ressources pour qu’ils prennent des décisions informées et que sur cette base le management mettent les ressources là où c’est nécessaire.

Plus d’adaptabilité, plus d’agilité mais quelles sont les mesures concrètes?

Nina Bjornstad : Si je prends l’exemple de All Saints, la marque de mode présente dans plus de 100 pays, ils ont une image homogène partout. Ils ont bougé sur Google et utilisent notre plateforme Google + pour diffuser cette homogeneité dans toutes leurs boutiques. Chaque employé a aussi la possibilité de faire des commentaires sur la manière dont les collections marchent, comment les mannequins sont habillés etc…

Et ces commentaires sont visibles jusqu’au niveau du CEO donc ce n’est plus lui, seul, qui fixe la direction mais également les employés qui l’aident à l’affiner. Ceci donne la possibilité de s’adapter aux réalités locales. Tous ces commentaires sont aussi visibles de toute la chaine d’approvisionnement, du créatif au fabricant. Il n’y a plus de temps perdu et ils sont capables de faire des ajustements. Un autre exemple, ce sont les trainings pour former les employés en ligne grâce à Youtube, ce qui correspond parfaitement à la culture de la génération X, Y et Z.

Un autre exemple, c’est aussi le lien avec le back office et la possibilité d’avoir des informations en temps réél sur la fréquentation des boutiques, les clients, ce qu’ils essaient etc…Ils sont ainsi capables de faire des changements immédiats. La technologie est donc devenue une philosophie fondée sur la transparence, l’innovation et le temps réel.

Quel est ainsi le nouveau rôle du manager dans ce dispositif ?

Nina Bjornstad : Je prendrai mon exemple pour l’illustrer. Quand je suis arrivée comme Country Manager chez Google, je pensais que mon rôle était de fixer les directions et je me souviens qu’à notre première réunion mon équipe m’a regardé de travers car ils pensaient tous que nous dévions créer le futur ensemble, en temps réel et de manière collaborative. J’étais très inconfortable et pensais que j’avais surestimé mon rôle.

J’ai ainsi pris conscience que mon rôle était d’exploiter leurs idées et veiller à enlever les blocages en matière d’investissement et d’énergie pour qu’ils puissent réaliser leurs projets. Ce changement de posture implique d’avoir d’autres qualités managériales. Il faut avoir assez confiance en soi pour ne pas dicter mais plutôt aider en mettant les ressources à dispositions.

Et cela se passe comme cela chez Google, c’est très collaboratif?

Nina Bjornstad : Chez Google nous avons pour philosophie de tout partager. Aucun d’entre nous n’a de disque dur, tout est sur le cloud, ce qui signifie que j’ai accès à l’intelligence des 40 000 employés de Google sur mon téléphone. Je peux chercher tout ce que je veux, ce qui, quand j’ai un rendez-vous avec une entreprise cliente me rend plus “intelligente”. C’est donc ce principe de transparence couplé avec cette capacité de recherche qui me semble plus forte que ce qu’on appelle le “management de la connaisance”.

Ce qui m’a surpris également quand je suis arrivée, c’est que j’avais le sentiment d’un grand chaos, je m’attendais à ce que quelqu’un me dise ce que je devais faire mais en fait tous les trimestres, nous avons un OKR ( Objectifs and Key results) dans lequel, les deux fondateurs Serguei et Larry publient leurs inspirations et ce sur quoi ils veulent que l’on mette l’accent dans les quatre prochains mois, tout le monde est au courant à tous les niveaux.

On attend de moi en retour que je publie mes objectifs en toute transparence. Ce que cela m’assure? C’est que je vais me concentrer sur ce qui me tiens vraiment à coeur alors que dans la plupart des business on assigne des tâches aux gens. Cela rend de fait beaucoup plus créatif, performant et plus passionné !

Les entreprises ont du mal à retenir les talents aujourd’hui notamment la génération Y et Z, c’est peut être une des solutions?

Nina Bjornstad : Tout à fait et d’ailleurs, il y a des études qui montrent que les gens sont capables de prendre des salaires plus bas si leur travail a plus de sens. Ce en quoi nous croyons chez Google, c’est que les innovations arrivent quand on travaille en mode collaboratif. C’est pourquoi si vous venez chez Google, vous verrez beaucoup d’espaces ouverts qui ressemblent à des cafés car nous pensons que nous devons avoir des lieux où nous pouvons être créatifs, nous relaxer et être ensemble.

Google dépense beaucoup d’argent la dessus. Il n’y a plus cette notion de meeting où finalement on ne fait que se mettre à jour sur l’état d’avancement d’un projet car nous travaillons en mode collaboratif.

Véronique Forge

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